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Une vraie taxe des millionnaires ou une taxe placebo ?

S’il y a bien une phrase mystérieuse dans l’accord Vivaldi, c’est celle indiquant que « le gouvernement demandera une contribution équitable aux individus qui ont la plus grande capacité contributive, dans le respect de l’entrepreneuriat ». Car selon que l’on écoute l’une ou l’autre des quatre saisons, on a affaire à une taxe totalement différente...

Lundi 12 octobre 2020

Ce prélèvement, que l’on pourrait donc nommer la « Taxe épaules larges », ne se trouve pas dans le tableau budgétaire distribué par le gouvernement. Ce qui s’expliquerait par le fait, comme certains l’affirment, que les contours de cet impôt ne sont pas encore dessinés. Cela n’empêche pas d’autres d’être déjà fort affirmatifs. Et contradictoires…

Ainsi, le président du PS Paul Magnette présente cette taxe comme un véritable impôt, récurrent, sur les patrimoines de plus d’un million d’euros, s’accompagnant d’un cadastre des fortunes et de la fin du secret bancaire. Bref, une véritable taxe des millionnaires clé sur porte. Le vice-Premier ministre Ecolo Georges Gilkinet va dans le même sens : on vise non les flux (revenus), mais les stocks (patrimoines) de plus d’un million d’euros.

Le président de l’Open Vld, Egbert Lachaert, présente lui une version assez différente : l’idée n’est pas de créer un cadastre du patrimoine, explique-t-il. Il entend donc trouver des solutions pour que l’argent soit imposé à la source, par exemple lorsqu’une transaction est effectuée. Des modalités pas vraiment limpides, mais qui montrent de sérieuses oppositions potentielles sur la manière de prélever cet impôt… s’il voit le jour.

Contribution symbolique ?

Le libéral a pour lui le fait que la déclaration de la Vivaldi n’avalise nullement la fin du secret bancaire, ni la création d’un cadastre des fortunes. Tout au plus prévoit-elle la transmission des soldes bancaires au Point de contact central (PCC) de la Banque nationale, mais les conditions d’accès à ce fichier par le fisc restent strictement limitées à l’existence d’indices préalables de fraude.

Surtout, Lachaert martèle le caractère symbolique de cette taxe. Et ce point est essentiel au regard de l’histoire politique récente. Ainsi, le Premier ministre Alexander De Croo (Open Vld) expliquait lors du débat parlementaire sur la déclaration gouvernementale qu’il fallait élaborer patiemment et minutieusement cette taxe car des impôts récents, comme la taxe sur les comptes-titres, avaient subi des sorts funestes faute d’avoir été bien conçus techniquement.

Or, ce ne sont pas des problèmes techniques qui ont eu raison des défuntes taxe sur les multinationales du gouvernement Di Rupo, taxe spéculation du CD&V ou taxe comptes-titres du gouvernement Michel. C’est le fait qu’il s’agissait de taxes placebos : des prélèvements symboliques ne présentant pas une véritable alternative à d’autres prélèvement fiscaux, mais visant à prétendre au peuple contribuable que les riches ont également consenti un effort. Bref, un instrument plus politique que budgétaire, dont le faible rendement était inférieur aux problèmes causés ou était source de discrimination, ce qui a poussé la Cour constitutionnelle à annuler la taxe sur les comptes-titres. À cet égard, cette annulation pose une question centrale : les plus grandes fortunes du pays, qui possèdent leur patrimoine via des actions nominatives, seront-elles visées ou épargnées ? À entendre Lachaert, pas question de viser les actions nominatives.

Le rendement attendu corrobore la finalité symbolique : autour de 200 millions d’euros pour Lachaert, jusqu’à 300 millions dans les options les plus impétueuses. Sachant que le 1 % le plus riche de la population belge possède un patrimoine de quelque 500 milliards d’euros, une telle recette représenterait à peine 0,06 % des richesses visées. Attention, pas 0,6 % mais bien 0,06 % !

Des symboles pour les plus riches, la facture pour le reste de la population

Comme le montre le tableau budgétaire, le véritable effort budgétaire – plus d’1,5 milliard – est donc axé sur les classiques coupes dans les services publics (600 millions d’euros d’après le tableau budgétaire), coupes sociales (200 millions d’euros visant les malades à longues durées) ou taxes sur la consommation (750 millions d’euros). Et le président du CD&V, Joachim Coens, annonce déjà d’autres de ces taxes indirectes injustes, que la Vivaldi mènerait sous l’étendard des objectifs climatiques ou de la lutte contre la malbouffe. Des symboles pour les plus riches, la facture pour le reste de la population donc.

Mais ce que les gens attendent, c’est justement une rupture avec cette politique. Ce n’est pas une taxe symbolique sur les plus riches, c’est une vraie taxe des millionnaires. Le fossé n’a jamais été aussi grand entre les pauvres et les plus riches en Belgique. Alors qu’une partie grandissante de la population a des difficultés pour boucler les fins de mois, un 30e membre vient de rejoindre le club des milliardaires belges. C’est pour ça que nous proposons une vraie taxe des millionnaires de 1 % sur les fortunes au-dessus de 1 million d’euros. Cela rapportait 7 à 8 milliards d’euros. Chaque année. Des moyens conséquents pour financer de réelles avancées sociales et répondre aux besoins de la population. Comme l’ont montré des enquêtes récentes, plus de 80 % de la population, au nord comme au sud du pays, est en faveur d’une telle taxe.1 Si les partis de la coalition Vivaldi veulent vraiment regagner la confiance de la population, ils savent ce qui leur reste à faire.



1. Etude RepResent coordonnée par le professeur Walgrave à lire ici