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Quel est le bilan du gouvernement PS-Ecolo-cdH « Olivier », qui a dirigé la Wallonie entre 2009 et 2014 ?

Peut-on se fier à une déclaration gouvernementale pour juger de ce que va effectivement faire un gouvernement ? Peut-on impulser une politique réellement de gauche sans rompre les carcans budgétaires ? Ces questions sont au centre du débat sur la formation d’un gouvernement wallon minoritaire, dit Coquelicot, mais aussi au cœur des raisons de l’échec des discussions PS-PTB. Le précédent du gouvernement wallon dit Olivier (PS-Ecolo-cdH) est très éclairant.

Jeudi 27 juin 2019

Nous sommes le dimanche 11 juillet 2009. Il est 16 heures. Elio Di Rupo pour le PS, Jean-Michel Javaux (assisté de Stéphane Hazée) pour Ecolo, Joëlle Milquet pour le cdH, annoncent un accord pour la constitution d’un gouvernement de gauche en Région wallonne : l’Olivier était né.

Le 16 juillet, les trois présidents de partis présentent fièrement l’accord écrit qui fonde leur unité : la déclaration de politique gouvernementale. Nous sommes dix ans plus tard. Autour de la table, les mêmes, ou presque.

Elio Di Rupo dirige les négociations pour le PS et c’est Jean-Marc Nollet, accompagné de Stéphane Hazée, qui représente Ecolo. La différence ? Avant de recevoir Ecolo, le PS a invité le PTB autour de la table et a juré ses grands dieux qu’il était prêt à s’accorder avec le PTB sur une déclaration de politique gouvernementale de gauche. Le PTB a cependant quitté la table des négociations, par manque de confiance envers le PS et en raison de l’absence de volonté du PS de rompre avec le carcan austéritaire européen.

Certains se posent donc aujourd’hui la question suivante : n’aurait-il pas fallu aller jusqu’au bout des négociations pour voir si le PS était prêt à arracher un véritable accord de gauche et, dans ce cas, avoir la garantie écrite, signée par tous les partis, d’une politique progressiste en Wallonie ?

L’expérience du gouvernement Olivier, qui a dirigé la Wallonie de 2009 à 2014, démontre le contraire, dès lors qu’il n’y a pas de volonté de sortir du cadre austéritaire des traités européens. Il suffit de voir, comme nous le faisons ci-dessous, à quel point le fossé est profond entre le contenu de la déclaration de politique gouvernementale de 2009 et les résultats du gouvernement à la fin de la législature.

C’est notamment avec le bilan de ce gouvernement Olivier que le PTB s’est assis à la table avec le PS début juin 2019. Un gouvernement qui a pris des mesures d’austérité importantes pour respecter le cadre budgétaire européen et qui a abandonné ses belles promesses de début de législature. Or, lorsque nous avons demandé au PS s’il était prêt à réellement rompre avec ce cadre austéritaire, la réponse était négative. Il était donc évident que tous les éventuels accords qui auraient pu être trouvés autour de cette table sur des mesures sociales et progressistes n’auraient pas pu être tenues, car recalées par les restrictions budgétaires imposées par l’Union Européenne.

Aujourd’hui, nous retraçons posément le bilan de ce gouvernement Olivier PS-Ecolo-cdH. Un homme (ou une femme) averti(e) en vaut deux.

La fête de l’Olivier n’a duré que 15 jours…

Le 16 juillet 2009, citoyens, syndicalistes et acteurs de la société civile découvrent un texte dont certains accents sonnent plus à gauche que celui de la coalition précédente. Il est vrai que, d’un côté, ce texte reste dans la ligne de ce que les gouvernements précédents avaient écrit. La vision de fond économique reste d’essence libérale (« développer l’attractivité de la Wallonie » pour les grands acteurs privés) et la déclaration gouvernementale annonce, avec le Plan Marshall rebaptisé Plan Marshall 2.vert, un soutien public aux entreprises privées et des mesures fiscales favorables aux multinationales sans contrepartie pour l’emploi.

Pourtant, de l’autre côté, la déclaration est aussi pleine d’intentions aux accents plus prononcés à gauche.

1. Concernant le logement, on trouve notamment la construction de 6000 logements publics et l’orientation pour les communes de tendre vers 10 % de logements publics contre une moyenne de 6,42 % au moment de la signature.

2. Concernant les transports en commun, la déclaration axe clairement la politique sur une amélioration de l’offre en insistant sur le caractère modeste du coût du billet de transport.

3. Concernant l’énergie, la déclaration évoque une diminution de la facture pour les ménages à bas et moyens revenus.

4. Enfin, concernant l’éthique, la déclaration interdit aux mandataires politiques de dépasser le plafond de 150 % de la rémunération d’un député et oblige les mandataires, gestionnaires et actionnaires détenteurs de mandats dérivés à reverser l’ensemble de leurs jetons ou émoluments aux sociétés publiques qui y sont liées.

Une partie de ces mesures nécessite clairement des dépenses. Et tout le monde de se demander : avec quel argent ? Cependant, la déclaration ne dit rien de concret concernant la politique de financement de ces politiques sociales. C’est d’autant plus interpellant, que nous sommes seulement une année après la crise bancaire. Les pouvoirs publics viennent juste de trouver des milliards pour sauver les banques avec l’argent du contribuable. L’Union européenne et la Commission mettent la pression pour réduire les déficits budgétaires et diminuer les dépenses publiques. Mais, pour le PS, Ecolo et le cdH, c’est comme si tout cela n’existait pas. Comme si les négociations entre eux s’étaient déroulées comme une discussion entre enfants autour de catalogues de la Saint-Nicolas pour décider ce qu’ils voulaient sans savoir si les parents seraient prêts à l’acheter.

Naïveté, penseront certains. Absolument pas. Tous savent que les discussions doivent avoir lieu dans un cadre budgétaire imposé par les règles d’austérité européennes. Mais, plutôt que de lier les deux et de décider ensemble de refuser ce carcan budgétaire, plutôt que de discuter d’une fiscalité qui touche les multimillionnaires et plutôt que de s’accorder sur l’importance de refuser les règles d’austérité antisociales imposées par l’Union européenne, ils préfèrent d’abord faire semblant.

En ignorant consciemment ce problème devant les caméras, les partenaires permettent au premier acte de leur union de se terminer dans la liesse. Santé !

… la gueule de bois a duré cinq ans

Cependant, le deuxième acte se prépare déjà et on s’agite en coulisses. La déclaration est à peine signée que les discussions budgétaires s’accélèrent autour des mesures d’austérité à prendre pour atteindre l’équilibre réclamé par la Commission européenne.

Le mardi 30 juillet 2009, à 17 heures, le ministre fédéral des Finances, Herman Van Rompuy, s’entretient avec Elio Di Rupo (PS), Jean-Michel Javaux (Ecolo) et Joëlle Milquet (cdH) ainsi qu’avec Michel Daerden (PS), ex-ministre du Budget en Région wallonne et en Communauté française. Le résultat ne se fait pas attendre : les Gouvernements de la Wallonie et de la Communauté française décident d’un ensemble de mesures de restrictions visant à « maîtriser l’évolution des dépenses ». L’objectif de ces deux Gouvernements ? Respecter le cadre budgétaire européen et placer la Wallonie et la Communauté française sur une trajectoire de retour à l’équilibre budgétaire à l’horizon 2015.

Ces mesures sont mises en œuvre dès l’ajustement du budget 2009 et, plus tard, dans le cadre de l’élaboration du budget 2010. Les principales mesures d’économie ne sont pas ponctuelles mais récurrentes sur l’ensemble de la période 2009-2015. On a par exemple, la réduction de 3 % des dépenses relatives à la fonction publique (notamment les fonctionnaires), le gel des subventions de fonctionnement et/ou d’investissement accordées aux organismes d’intérêt public (comme celles attribuées à la Société wallonne du Logement ou aux TEC)1 ou la suppression d’une série de politiques nouvelles envisagées lorsque la conjoncture économique était plus favorable.

Au niveau de la Communauté française, la revalorisation des dotations et subventions de fonctionnement des établissements de l’enseignement et le refinancement des universités est revue à la baisse. Cerise sur le gâteau ? Les gouvernements de la Wallonie et de la Communauté française ont décidé, en 2010 et en 2011, d’utiliser les recettes additionnelles liées à la reprise de l’activité économique pour combler le déficit budgétaire au lieu de mener des politiques sociales.2 Avec quel résultat par rapport aux promesses faites ?

1. Moins de logements publics après 2014 qu’avant 2009

Le gouvernement PS-Ecolo-cdH promettait de construire 6000 logements publics en plus et de tendre vers 10 % de logements publics en Wallonie.

Que s’est-il passé en réalité ? Au lieu d’avoir 6000 logements en plus, il y a eu 2078 logements en moins. Et au lieu d’arriver à 10 % de logements publics dans toute la Wallonie, on avait, à la fin de la législature, seulement 6,21 % des familles qui vivaient dans un logement public, soit moins encore qu’au début de la législature.

En fait, les moyens promis par le gouvernement wallon pour atteindre ces objectifs n’ont pas été débloqués et on a même eu une diminution du budget octroyé au cours de la législature. Certains rétorqueront qu’il était difficile d’à la fois construire de nouveaux logements et de rénover ceux déjà existant, et que la priorité devait être mise sur la rénovation. C’est un argument qui ne tient pas la route. S’il est vrai que le parc est vétuste (avec des logements de 43 ans en moyenne en 2014)3 et qu’il nécessite des investissements massifs pour la rénovation, se cacher derrière cet argument pour justifier une diminution du nombre total de logements est de la mauvaise foi. Il ne s’agit pas de savoir si c’est prioritaire de construire ou de rénover. Il faut les deux.

Avec 6,4 % de logements publics, le nombre est trop restreint. Et avec une moyenne d’âge de 43 ans, il faut rénover. Le gouvernement de l’Olivier n’a réglé aucun des deux problèmes. Qu’a-t-il fait ? Concernant la rénovation, il a continué le Plan Exceptionnel d’Investissement (PEI) initié en 2004 puis, à la fin de ce programme, il a lancé un programme de rénovation moins ambitieux (Pivert). Mais même ces investissements à l’époque de l’Olivier n’ont pas été à la hauteur.4 L’année 2014 a même été l’année où l’on a le moins investi dans la rénovation par rapport aux dix années précédentes.5

Concernant la construction, le choix du gouvernement a été dans la droite ligne d’une décision politique de ne plus investir massivement dans la construction de logements sociaux. En effet, alors que, jusqu’en 1985, il y a encore eu une politique volontariste et ambitieuse en Région wallonne, depuis, les constructions de nouveaux logements ont fortement diminuées. Et ce choix politique a été encore renforcé par les mesures d’austérité imposées par l’Union Européenne. Résultat ? On a en fait beaucoup moins investi entre 2009 et 2014 qu’entre 2005 et 2009 dans la rénovation et la construction de logements.6

2. Moins d’offre pour les TEC et un ticket beaucoup plus cher

Prenons les transports en commun. Alors que le gouvernement Olivier promettait de garantir un coût modéré, il a augmenté les tarifs par trois fois dans la législature. Le ticket a ainsi augmenté de 45 %, passant de 1,30 euros à 1,90 euros. Le gouvernement PS-Ecolo-cdH a même réussi à supprimer la gratuité pour les plus de 65 ans (que PS-Ecolo promette aujourd’hui de réinstaurer).

Alors que PS, Ecolo, cdH promettaient une amélioration de l’offre en terme de capacité et d’accessibilité, ils ont fait le contraire : il y avait moins de bus TEC en circulation en 2014 qu’en 2009. Il y avait aussi moins d’arrêts pour desservir les quartiers et moins de kilomètres de réseau desservis par ces bus.

Certains pourraient rétorquer que le nombre de lignes a augmenté. Mais ce n’est pas le nombre de lignes qui est déterminant dans la qualité du réseau. Ce qui compte pour savoir si une population est bien desservie, c’est avant tout le nombre de kilomètres du réseau et le nombre d’arrêts. Or ceux ci sont en nette diminution.7

Comment expliquer ces mesures pourtant contraires à la déclaration ? Le gouvernement a décidé, sous la pression budgétaire, de geler la dotation de la Région wallonne aux TEC pendant plusieurs années de la législature. C’est d’autant plus incroyable qu’entre ces cinq années, le nombre d’usagers aux TEC a explosé et que l’importance évidente des transports en communs pour l’écologie aurait du en faire une priorité.

3. Un gouvernement qui fait augmenter la facture d’électricité

Concernant le coût de l’énergie, la déclaration annonce des mesures pour réduire la facture : « une tarification progressive pour aider les bas et les moyens revenus »,  « faciliter l’accès à l’énergie », « réduire l’impact des factures énergétiques des ménages par l’achat groupé et les systèmes de production d’énergie renouvelable »…

Résultat ? Alors qu’au 1er mars 2009, la facture moyenne annuelle en Région wallonne s’élevait à 650 euros pour l’électricité, elle atteignait 810 euros, le 1er mars 2014.

Est-ce que le gouvernement wallon en est responsable ? Pas totalement, mais il y a contribué fortement. Comment ? Dans les différentes composantes qui composent la facture, la partie « transport » a explosé en Wallonie entre 2011 et 2014 à cause du système des certificats verts développé par le gouvernement wallon pour le financement du photovoltaïque.

En effet, les subsides octroyés par la Région wallonne ont encouragé les particuliers à poser des panneaux solaires, ce qui a conduit à une forte augmentation du nombre de certificats verts produits. L’opérateur Elia avait reçu du gouvernement wallon l’obligation de les racheter à 65 euros pièce quoi qu’il arrive. Suite à cela, une surcharge « Elia » est donc née sur la facture des Wallons. Lee gouvernement a décidé que l’ensemble des Wallons allaient devoir payer le surplus. Conséquence ? À la fin de la législature, les ménages wallons payaient 70 euros pour ces certificats chaque année. Le gouvernement annonçait pourtant qu’il fallait « réduire l’impact des factures énergétiques des ménages par l’achat groupé et les systèmes de production d’énergie renouvelable »...

Dans sa déclaration, le gouvernement avait aussi promis une tarification progressive pour réduire la facture des Wallons, mais ce système n’est entré en vigueur que sous le gouvernement suivant, sans d’ailleurs produire d’effets sérieux sur la facture. Certains tenteront certainement de rappeler qu’au fédéral, le ministre de l’Énergie, le cdH Melchior Wathelet, a fait baisser la TVA de 21 % à 6 % sur l’énergie. Mais cette décision a seulement été prise sous la pression populaire (notamment une pétition de 250 000 signatures du PTB), et à quelques mois des élections. Elle a très vite été levée par le MR lors du gouvernement suivant. Les Wallons, les Bruxellois et les Flamands n’ont donc pas pu en bénéficier longtemps...

4. Un coma éthique qui a mené au scandale Publifin

Ce gouvernement Olivier annonçait aussi une révolution éthique, et notamment le fait que « les émoluments liés aux mandats dérivés de ces fonctions seront rétrocédés à l’institution ». Toujours animée par des valeurs de gauche, la déclaration annonçait aussi « l’application du plafond de rémunération équivalent à 150 % de l’indemnité parlementaire aux mêmes administrateurs et commissaires ».

Qu’ont-ils fait de ces promesses ? Publifin nous l’a appris. Les émoluments des mandats dérivés n’ont absolument pas été reversé aux institutions : les politiciens traditionnels qui ont siégé dans ces institutions ont continué à s’en mettre plein les poches, comme par exemple les réunions bidon à 500 euros la minute chez Publifin, qui ne sont encore que le sommet de l’iceberg. D’ailleurs, tous les politiciens qui ont dépassé le plafond de rémunération ont pu le faire sans problème et ont gardé l’argent dans leurs poches.

Il ne s’agit ici même pas d’obéir ou non à des directives européennes, mais de respecter des promesses qui ne coûtent à personne sauf à leur propre portefeuille. Et que font-ils ? Ils s’assoient sur ces promesses.

Une soumission volontaire à l’austérité européenne

Pourquoi un gouvernement qui négocie pendant un mois et qui accouche d’une feuille de route avec certains accents de gauche abandonne ses promesses ? L’explication centrale tient en deux mots : l’austérité européenne. C’est cette obéissance aux principes de l’austérité qui permet d’expliquer en partie le non respect des mesures de gauche promises.

Comment l’Union Européenne impose-t-elle ces mesures ? L’équilibre budgétaire est d’abord imposé par les normes de comptabilité européennes SEC 2010 et des directives budgétaires européennes. Ces normes et directives visent à ce que les États, les régions et les pouvoirs locaux d’Europe atteignent l’équilibre budgétaire et limitent l’endettement. Un peu comme si on demandait à un athlète de courir un 100 mètres avec les pieds attachés.

Mais ce n’est pas tout. En effet, en 2013, PS, Ecolo et cdH vont plus loin et votent l’application d’un traité européen d’austérité (le TSCG). Ce traité coule dans un texte contraignant les normes et directives qui interdisent aux pouvoirs publics d’avoir un déficit de plus de 0,5 % du PIB, obligeant par là ces pouvoirs publics à limiter les dépenses. La différence entre avant le TSCG et après le TSCG ? Le respect des trajectoires qui visent à limiter les dépenses devient obligatoire, sous peine de sanctions.8

Pourtant, lorsque le débat autour du TSCG s’engage, la FGTB et la CSC wallonnes, ainsi que de nombreuses associations, appellent à rejeter un texte qui constitue selon elles une « grave menace pour [les] droits sociaux et démocratiques ». La Centrale des employés de la CSC, la CNE, écrit même : « Les parlementaires qui voteront ce texte, ou simplement s’abstiendront, seront complices et coupables de haute trahison envers la démocratie. »

Pourquoi, dès lors, le PS et Ecolo ont-ils quand même accepté de se mettre la corde autour de cou, avec interdiction de la desserrer ou de l’enlever ?

Ecolo, qui a voté contre le TSCG au parlement fédéral (où le parti était dans l’opposition), a voté pour à la Région (où il était en majorité) en justifiant qu’il a pu insérer dans le texte une clause visant à respecter les objectifs sociaux et environnementaux poursuivis par la Région.9 À cette époque, le ministre Jean-Marc Nollet, le négociateur actuel d’Ecolo, a fait le tour de toute la Wallonie pour convaincre la base de son parti de voter « oui » à ce traité avec l’insertion de cette clause. Or même les objectifs fixés dans la déclaration de gouvernement, avant l’existence du TSCG, n’ont pas été atteints, alors qu’il n’était pas encore question de sanction par l’Europe en cas de non application des mesures demandées. Pourquoi en serait-il autrement alors que pèse dorénavant la menace de sanctions sur ceux qui ne respectent pas ce traité ?

Du coté socialiste, c’est Elio Di Rupo qui a approuvé le TSCG au Conseil européen et l’a défendu le traité au fédéral. Plus tard, Paul Magnette a expliqué pourquoi il considère ça comme une bonne décision prise au nom du « moindre mal » : « Je suis fasciné par l’intelligence tactique des hauts fonctionnaires et les grands diplomates qui mènent l’Europe à la baguette, ce sont des gens d’un talent absolument remarquable. [...] Ils ont d’abord proposé le two-pack, puis le six pack, c’est-à-dire un cocktail de règlements et de directives, en deux temps. Ensuite, seulement, ils ont prévenu qu’on mettrait le tout dans un traité. [...] Par la suite, ils ont menacé les pays qui ne voteraient pas le traité de leur refuser le mécanisme de stabilité européen en cas de crise bancaire. Nous, les socialistes belges, ça nous a mis devant un dilemme terrible. À l’époque, Belfius et Fortis n’étaient pas si stabilisés que ça. Alors, soit on maintenait notre opposition, au risque de faire tomber le gouvernement, soit on était bien obligés de digérer le traité, pour éviter des conséquences dramatiques en cas de nouvelle crise bancaire. »10 Conclusion de l’intéressé ? « Le pacte, le mandat de la Banque centrale, toutes ces choses, oui, mais nous ne disons pas : il faut revoir les règles, point. On peut déjà faire énormément de choses à règles constantes, appliquer très différemment les traités. » 11

En résumé ? Magnette justifie l’adhésion au TSCG en disant trois choses. D’abord, que la pression était très forte de la part des hauts fonctionnaires et des grands diplomates européens sur les gouvernements. Ensuite, qu’il fallait bien céder à cette menace pour être certain que l’Union Européenne aide la Belgique et la Wallonie en cas de nouvelle crise bancaire. Et, enfin, que ce vote et ces règles ne sont pas si graves car il y a moyen de bien travailler dans le cadre de ces traités. À cause de la pression et sous prétexte qu’il faudra peut-être encore sauver les banques, on accepte de se mettre une corde autour du cou en concluant qu’on peut quand même mener une politique de gauche en appliquant ces règles. Voilà ce que le PS tente de faire croire. Voilà aussi tout simplement pourquoi le PTB n’a aucune confiance dans la volonté actuelle du PS de désobéir à l’austérité imposée par la commission européenne et de résister à la pression qui s’en suivra...

Une cure sociale s’impose

En 2014, après une défaite électorale d’Ecolo, qui a déçu fortement ses électeurs, l’Olivier tombe et est remplacé par un gouvernement PS-cdH dirigé par Paul Magnette. Que va faire ce gouvernement entre 2014 et 2017, quand le cdH rejette le PS et s’allie avec le MR pour former un nouveau gouvernement wallon ? Dès le départ, il s’engage à résorber un déficit de 1,1 milliard euros et vise le retour à l’équilibre budgétaire pour 2018.

Première étape annoncée quelques temps après avoir publié la nouvelle déclaration de politique gouvernementale ? Trouver 650 millions en 2015, sans augmenter les recettes fiscales. Pour y parvenir, il table sur les recettes libérales du Plan Marshall ainsi que sur une baisse des dépenses de fonctionnement, avec notamment le remplacement de seulement un fonctionnaire pour cinq départs. Il n’hésite pas non plus à sanctionner massivement les chômeurs.

Conclusion ? Même quand il n’est pas poussé sur sa droite par le MR, le PS ne tient pas la barre à gauche. C’est une constante dont il n’arrive pas à se débarrasser. Les critiques pour la forme du PS face à l’austérité ne pèsent pas bien lourd. Lorsqu’elles ne sont pas accompagnées de décisions pratiques, de telles déclaration ont le même effet que des déclarations de politique gouvernementales qui ne sont pas appliquées : elles font mal à la tête. Et à la gauche.

Le PS a proposé au PTB de monter dans une majorité sans refuser d’appliquer les traités européens. Il s’agissait pour le PTB d’acheter un chat dans un sac. Nous avons refusé et nous avons eu raison. Ce dont nous avons besoin, ce n’est pas d’un flot de promesses, mais d’une politique sociale qui puisse effectivement se réaliser. Pour cela, il faut oser désobéir aux règles austéritaires et aux carcans budgétaires pour pouvoir réellement investir de l’argent public dans le logement, les énergies renouvelables, les transports publics... C’est la seule façon d’arrêter avec l’austérité.


Notes

  1. Les perspectives budgétaires de la Région wallonne de 2010 à 2020, p. 97
  2. Le programme de stabilité en Belgique 2009-2012 et le programme de stabilité en Belgique 2011-2014
  3. Les chiffres-clés du logement public en Wallonie, 2016, p. 81
  4. Le volume n'atteint pas celui de la législature précédente et même la société wallonne du logement explique que les chiffres de logements rénovés avancés doivent être « considérés avec prudence car ces statistiques reprennent autant les logements qui ont fait l'objet de remplacements d'éléments particuliers d'un seul type (électricité, sanitaire ou toiture) que des éléments combinés et plus lourds ».
  5. Rapport annuel de la société wallonne du logement, année 2014, p. 14.
  6. Rapport annuel de la société wallonne du logement, année 2014, p. 14.
  7. Dans le rapport annuel des TEC de 2009, on annonce un réseau d'une longueur de 18 227 km contre 14 623 annoncés dans le rapport 2014. - Dans le rapport annuel des TEC de 2009, on annonce un total de 19 069 arrêts contre 16 182 arrêts annoncés dans le rapport 2014. Dans le rapport annule des TEC 2009, on annonce 1826 bus TEC et 620 bus privés (qui battent pavillon TEC) contre 1805 bus TEC et 636 privés (qui battent pavillon TEC) en 2014.
  8. Techniquement, la contrainte est organisée de la façon suivante en Belgique. Afin d’assurer l’atteinte de cet objectif d’équilibre pour l’ensemble des administrations publiques, un mécanisme de coordination est instauré entre les différents gouvernements des entités fédérales et fédérées. Ainsi, dans le cadre de la mise à jour du programme de stabilité, l’accord de coopération prévoit une répartition des objectifs budgétaires annuels en objectifs individuels entre les différents niveaux de pouvoirs. Plusieurs dispositions ont été prévues dans l’accord de coopération afin de garantir le respect des objectifs budgétaires par chaque gouvernement. Si un écart important est effectivement constaté, le gouvernement concerné devra justifier cet écart et, conformément au Traité, prendre des mesures immédiates de correction. La Section Besoins de financement des pouvoirs publics du Conseil supérieur des Finances doit émettre un avis sur l’ampleur des mesures de correction à prendre. Ces mesures de correction doivent permettre de remédier à l’écart dans un délai de 18 mois, sauf si la réalité économique ou institutionnelle justifie une période plus longue selon l’avis de la Section Besoins de financement du Conseil supérieur des Finances.
  9. Les contraintes budgétaires du TSCG devront faire l’objet d’une évaluation préalable, tenir compte du bon fonctionnement des services d’intérêt général et préserver les objectifs sociaux et environnementaux poursuivis par la Région.
  10. Interviwe e P Mgnette dans Wilfried, p. 27.
  11. Itw croisée de P magnette et O chastel dans le Soir : « rigueur budgétaire, plus de souplesse svp » , 22 mai 2019.