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Mondial au Qatar : s'en prendre aux vrais responsables

Tous les quatre ans, un événement sportif fait vibrer des milliards de personnes : la coupe du monde de football. Réunissant des gens de tous les continents, ce qui pourrait être une fête populaire est pourtant de plus en plus (légitimement) critiquée... Pour autant, pas question de fermer les yeux ni de baisser les bras, au contraire.

Lundi 7 novembre 2022

Lʼattribution de lʼorganisation de la Coupe du monde au Qatar sʼest faite par corruption et est une catastrophe humaine, sociale et écologique. Néanmoins, le football reste un sport populaire, qui rassemble, qui unit. Les appels au boycott des téléspectateurs ont fait couler beaucoup d’encre et divisent. Mais cette stratégie rate en grande partie la cible, épargnant notamment les multinationales responsables de la situation sur place. Du côté des syndicats et des organisations de défense des droits humains, la pression doit être mise sur la FIFA, organisatrice de lʼévénement : la campagne #PayUpFIFA vise à obliger lʼorganisatrice à indemniser les ouvriers travaillant sur les chantiers de cette compétition, victimes de conditions de travail épouvantables. Explications.

Du 20 novembre au 18 décembre, lʼattention médiatique sera concentrée sur un État microscopique et désertique de 2,8 millions dʼhabitants : le Qatar. Ce micro-État, richissime grâce au pétrole et sans tradition de football, a pu acheter la Coupe du monde en 2010. Et le prix de cette organisation n’est pas que financier, loin de là : son coût social et écologique est aussi élevé. Au moins 6 500 ouvriers étrangers (venus d’Inde, du Pakistan, du Népal, du Bangladesh et du Sri Lanka) seraient morts en construisant des stades en plein désert. Organisée en hiver, la Coupe du monde se déroulera dans des nouveaux stades construits uniquement pour l’occasion et qui seront... climatisés. La prochaine Coupe du monde de football est donc sous le feu de critiques plus que légitimes.

Photo Noushad Thekkayil

Que faire ?

Il y a beaucoup de bonnes raisons de critiquer ce qui se passe au Qatar. Et il y a de bonnes raisons de s’opposer à l’envoi de nos responsables politiques sur place (qui, de toute façon, n'y vont que pour se pavaner aux côtés des Diables rouges). Mais les appels tardifs au boycott des spectateurs ne sont pas forcément le plus productif. Qu’on le veuille ou non, cette Coupe du monde aura lieu et des centaines de millions (et même milliards) de gens vont la regarder et la vivre intensément. Plutôt que de pointer du doigt ceux-ci (qui n'ont aucune responsabilité dans la situation), l’enjeu est d’arriver à cibler les vrais responsables et de les toucher là où ça fait mal. Il y a des initiatives positives à soutenir dans ce sens.

Ciblons les vrais coupables : la FIFA et le Qatar...

Les syndicats et des organisations de défense de droits humains ont lancé une campagne visant à faire payer la FIFA et le Qatar sous le nom #PayUpFIFA. Celle-ci vise à faire indemniser les familles des ouvriers. La FIFA devrait réserver un montant minimum de 420 millions d’euros – soit la somme que la FIFA versera aux équipes qualifiées – afin de fournir des réparations aux centaines de milliers de travailleurs migrants ayant subi des violations des droits humains au Qatar lors des préparatifs pour la Coupe du monde 2022, selon les organisateurs de la campagne. Outre cela, et vu les pratiques mafieuses de certaines compagnies, syndicats et associations demandent aussi que les salaires soient effectivement versés aux travailleurs qui attendent parfois des mois avant de toucher leur misérable paie.

On estime à 6 milliards de dollars les bénéfices nets que va se faire la FIFA sur cette compétition. Touchons donc ces bénéfices, véritable moteur du foot-business actuel.

Une grosse majorité de la population soutient dʼailleurs cette initiative : un sondage réalisé en septembre dernier montre que plus de trois quarts (77 %) des personnes interrogées en Belgique sont en faveur de l’indemnisation par la FIFA des travailleurs migrants qui ont souffert pendant la préparation de la Coupe du monde 2022 au Qatar, « avec un soutien encore plus marqué chez les personnes susceptibles de regarder au moins un match de ce tournoi (85 %) ».

... ainsi que « nos » multinationales

Nʼoublions pas de cibler les entreprises qui se font des profits gigantesques en exploitant les travailleurs au Qatar… et ici. Quelles sont ces grosses entreprises ? Les géants français Bouygues, Vinci, mais aussi le belge Besix. Ce dernier se vante même des conditions sur leur chantier au Qatar : « Dans de nombreux cas, notre bilan de sécurité local y est souvent meilleur que partout ailleurs dans le monde, y compris en Europe », expliquait la direction du géant du béton dans lʼEcho du 13 juillet 2021. De qui se moquent-ils ?

Ouvrir les yeux et dénoncer

Outre les syndicats et les organisations de défense des droits humains qui veulent profiter du mondial pour mettre un coup de projecteur sur le système qatari, dʼautres défendent cette optique. Comme le média français d'investigation Mediapart, qui sʼen expliquait le 2 octobre dernier : « Que le Mondial de foot se joue au Qatar ou ailleurs, l’exaspération démocratique et sociale face à la crise climatique et à l’inégalité des richesses impose aux grandes compétitions de changer de modèle. Il faut documenter et dénoncer la confiscation du football par des instances sportives et politiques ultralibérales. En espérant que les prises de conscience changeront enfin le cours des événements sportifs. » 

Ou le magazine français So Foot : « La tendance est assez similaire à ce qu’il est possible d’entendre au sujet de l’écologie. Il s’avère toujours tellement plus facile de réclamer au "péquin" (individu, NdlR) de prendre ses responsabilités envers la planète – tri sélectif, acheter un vélo, etc. – que d’imposer au niveau "macro" – État, entreprises – des décisions douloureuses pour le portefeuille. »

Vibrer collectivement devant un match de foot est pourtant le sel de ce sport. Mais ça, la FIFA, organisme portée sur la recherche de profits, sʼen fiche. (Photo Alexandros Michailidis)

On peut être anticapitaliste et aimer le foot

Le football est le sport le plus populaire au monde. Plus de la moitié de la planète a regardé lʼédition précédente en 2018. Et cʼest compréhensible. Cʼest un sport universel, qui se féminise (enfin) de plus en plus. Le football fait rêver les gamins et gamines du monde entier. Il rassemble les gens, peu importe leur langue, leur couleur, leur origine. Le foot est vecteur dʼunité.

En organisant ce genre de compétitions dans ces conditions, la FIFA veut aussi nous enlever ça. Que faire alors ? Se battre pour récupérer notre football. Un football humain, solidaire, positif. Un football où le plaisir sera lʼobjectif, et pas le profit. Un football qui ne sera plus le miroir du système que nous subissons, mais de celui que nous voulons.