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Le VOKA, Magnette et le danger de scission de la sécurité sociale

Le grand patronat en Flandre est à l’offensive. Afin de pousser son agenda antisocial, il met sur la table de nouvelles exigences de scission de la sécurité sociale. En face, Paul Magnette semble prêt à entrer dans ce jeu. L’enjeu pour la gauche est plutôt de construire un grand mouvement de résistance capable de repartir à l’offensive. Et, pour cela, l’unité des travailleurs et de la sécurité sociale est cruciale.

Jeudi 9 janvier 2020

Ce n’est pas un secret : le grand patronat rêve de la scission la sécurité sociale. Cela a déjà commencé avec la 6e réforme de l’État, qui régionalise les allocations familiales et une partie des soins de santé. Et, si les grands patrons veulent scinder et régionaliser la sécu, c’est pour mieux l’affaiblir et la démanteler, en mettant notamment hors-jeu les syndicats et tout leur potentiel de résistance. Il s’agit de pouvoir diminuer nos pensions, nos soins de santé et nos allocations de chômage et afin de garder plus d’argent pour les actionnaires.

On a vu ce mécanisme récemment en Flandre, où, maintenant qu’elles sont régionalisées, le gouvernement ne s’est pas privé de couper dans le budget des allocations familiales. Les familles flamandes seront ainsi privées de pas moins de 110 millions d’euros dans les années à venir. Du côté francophone aussi, la régionalisation des allocations familiales va mener à une diminution des budgets.

Le VOKA veut régionaliser les soins de santé et l’assurance chômage

Le VOKA, l’organisation des grands patrons flamands, veut passer à la vitesse supérieure et vient d’appeler, lors de sa réception de nouvel an ce 6 janvier, à une régionalisation complète des soins de santé et des matières liées à l’emploi. Ils veulent s’attaquer à des gros morceaux de notre sécurité sociale, notamment en essayant d’imposer ainsi une limitation des allocations de chômage dans le temps ou une baisse des remboursements des soins. Les plus riches, eux, pourront toujours prendre des assurances privées.

C’est une politique que paieront tous les travailleurs et la plus grande partie de la population. Non seulement en Flandre, mais aussi du côté francophone, où une telle régionalisation créera une concurrence et une mise sous pression des droits sociaux.

Pour réaliser ses plans, le VOKA compte depuis longtemps sur la N-VA. « Le VOKA est mon patron » avait déclaré De Wever dans le passé. Mais l’organisation patronale a maintenant aussi ouvert la porte au Vlaams Belang, lors des négociations du gouvernement flamand, estimant qu’il fallait pouvoir dialoguer avec le VB et que ce qui compte, c’est qu’un accord soit « favorable aux entreprises, à la société et à la Flandre ».1 Le grand patronat semble prêt à tout pour pousser ses plans.

Magnette prêt à capituler ?

Malheureusement, Paul Magnette et les socialistes donnent des signes de capitulation face à cette offensive patronale. Le 30 décembre dernier, dans une interview au journal Le Soir, il se dit notamment prêt à une réforme de l’État en 2024. Il y déclare aussi : « Une grande partie de la droite flamande dit qu’il faut limiter les allocations de chômage dans le temps. Soyons clairs, j’y suis opposé. Un chômeur à Charleroi ne va jamais trouver un travail si l’allocation s’arrête. Mais je peux comprendre que pour un Flamand qui vit à un endroit où il y a le plein-emploi, la question se pose. On doit beaucoup plus territorialiser les politiques. ». En faisant cela, il tente de donner des gages à des partenaires de droite et au patronat dans le cadre d'une éventuelle future coalition. C’est une évolution inquiétante.

Inquiétante, d'abord, parce que le raisonnement est faux et dangereux. Aucun travailleur ne va retrouver plus vite un emploi parce qu’il est exclu du chômage ou plongé dans la pauvreté. Ce genre de déclarations contribue à propager le cliché qui veut que le problème seraient les chômeurs qui profitent alors qu'il y a du boulot. La réalité est que, même dans la Flandre du prétendu plein emploi, une grande partie des jobs créés sont des sous-emplois, des jobs à temps partiels, mal payés et/ou avec des horaires impossibles.

C’est d’ailleurs entre autres pour forcer les travailleurs à accepter ces mauvais emplois que les patrons rêvent d’imposer une limitation des allocations de chômage dans le temps. Cette mesure toucherait donc non seulement durement les travailleurs sans-emploi (déjà victimes de plusieurs attaques ces dernières années), mais aussi l’ensemble des travailleurs, en faisant pression sur l’ensemble du monde du travail en tirant les conditions de travail vers le bas. C’est pour cela que la gauche doit refuser en bloc toutes ces attaques.

L’évolution du discours de Paul Magnette est également inquiétante parce qu’il accepte, au nom de ce raisonnement, la logique de scission de la sécurité sociale. Pour ne pas utiliser le mot « scission », il parle de « territorialisation ». Un peu à l'image de son prédécesseur à la tête du PS, Elio Di Rupo, qui avait parlé de « consolidation stratégique » pour ne pas utiliser le mot « privatisation ». Avec cette déclaration, Paul Magnette accepte en fait de rentrer dans la logique d’une régionalisation plus approfondie de la sécu. Un renoncement inquiétant face à l’offensive de la droite nationaliste flamande.

Construire le rapport de force sur le terrain pour résister

Toutes les enquêtes et tous les sondages montrent pourtant qu’il y a en Flandre, comme en Wallonie et à Bruxelles, une majorité au sein de la population pour imposer une politique sociale, taxer les millionnaires et les multinationales, baisser les factures et imposer une pension minimum à 1 500 euros net. C’est de cela que les patrons ont peur. Un récent article de De Tijd et L’Echo montrait que, des 1,2 millions de pensionnés qui vivent avec une pension en-dessous de 1 500 euros net, plus de 700 000 vivent en Flandre.

Le rôle de la gauche n’est pas de céder aux nationalistes et au patronat, mais, au contraire, de construire un large mouvement de résistance. Un mouvement qui implique tous les travailleurs et travailleuses du pays, avec les syndicats, les mutualités et tous les progressistes, pour résister et défendre une sécurité sociale unitaire et forte qui répond aux besoins de la population. Et pour arracher de nouvelles victoires, comme la pension minimum à 1 500 euros net.

C’est dans ce contexte que la manifestation nationale de la FGTB pour défendre la sécurité sociale le 28 janvier prend notamment toute son importance.

1. Nieuwsblad 29 mai 2019