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Le PTB à l’initiative d’un texte qui ouvre le débat pour le droit à l’IVG à la Chambre

Le PTB a déposé une proposition de loi relative au droit à l’avortement comme loi prioritaire en commission Justice de la Chambre en ce début de législature. D’autres partis ont joint des propositions similaires, ce qui donne espoir que le débat sera constructif et pourra déboucher sur une avancée pour les droits des femmes.

Mardi 22 octobre 2019

Cette proposition vise à ce que l’avortement soit reconnu comme un acte médical entrant dans le champ d’application de loi relative aux droits des patients et a pour objectif d'aboutir à une dépénalisation complète des interruptions volontaires de grossesse ainsi qu'un allongement du délai dans lequel une IVG est réalisable.

Actuellement, chaque année, un minimum de 500 femmes - qui en ont les moyens - se rendent à l'étranger (essentiellement aux Pays-Bas) pour avorter parce que le délai est trop court en Belgique.

Sofie Merckx, médecin et députée PTB, revient sur cette lutte incessante du mouvement féministe : « Il est impératif que nous, les femmes, puissions choisir librement. L’IVG est un acte médical comme un autre. Nous devons pouvoir bénéficier de soins médicaux appropriés et ce, sans crainte de subir des sanctions pénales. Protéger et garantir notre droit à disposer de notre corps est une priorité pour le PTB. »

Des propositions similaires écrites par le PS, Défi et Ecolo-Groen ont été jointes à celle du PTB. L'Open Vld vient également d'introduire un texte allant dans le même sens. Par ailleurs, le sp.a semble partager ces positions.

La commission Justice de la Chambre entamera ce mercredi 23 octobre l'examen du texte.

Le gouvernement étant en affaires courantes, les partisans d’une véritable dépénalisation ont bon espoir que le débat soit constructif.

Le droit à l’avortement : un combat de gauche toujours d’actualité

 

Dans de nombreux pays, le libre choix des femmes à avoir ou non un enfant est loin d’être acquis. Pire : nous ne sommes pas à l’abri de sérieux reculs. C’est pourquoi la mobilisation est plus que jamais d’actualité. En effet, c’est la mobilisation sur le terrain qui, dans l’histoire de la lutte pour le droit à l’avortement, a fait bouger les lignes pour ce droit fondamental des femmes. Aperçu.

Manifestation pour le droit à l'avortement en 1974. (Photo DR)

Manifestation pour le droit à l'avortement en 1974. (Photo DR)

Manifestation pour le droit à l'avortement en 1974. (Photo DR)

L’« affaire Peers » et les mobilisations à l’origine de la dépénalisation de l’avortement

En Belgique, le Dr Willy Peers a été la figure la plus célèbre du combat pour le droit à l’avortement. Le 18 janvier 1973, ce médecin gynécologue a été arrêté et incarcéré pendant 36 jours suite à une dénonciation anonyme pour avoir pratiqué un avortement sur une jeune fille (mineure) handicapée mentale qui avait été violée par le compagnon de sa mère.

Cette arrestation sera l’élément déclencheur de « l’affaire Peers » et d’une vaste mobilisation du mouvement féministe. Certains médecins sortent de la clandestinité et des militantes ouvrent des centres pratiquant l’avortement. Des manifestations sont organisées dans tout le pays. Le 29 janvier 1973, malgré une interdiction du bourgmestre, quelque 10 000 personnes marchent dans les rues de Namur. Une pétition récolte rapidement plus de 120 000 signatures, et 800 femmes et 200 médecins se déclarent symboliquement « complices » du Dr Peers pour avoir eu recours à/pratiqué l’avortement.

Les travailleuses de la FN à Herstal, les « femmes-machines » comme on les avait baptisées, vont également rejoindre les manifestations des femmes. Ces ouvrières luttent pour l’égalité des salaires : alors qu’elles travaillent comme les hommes, elles sont payées moins et ont moins de droits. Rappelons qu’à cette époque, les femmes mariées n’avaient pas le droit d’ouvrir un compte en banque sans l’autorisation de leur mari. Le combat pour l’avortement s’insérait donc dans une prise de conscience plus large : c’étaient toujours les hommes, l’Église, l’État, le médecin qui décidaient à leur place.

Ces femmes ont véritablement lancé la seconde vague de féminisme. « Ce que les femmes ont surtout obtenu, c’est la prise en compte des problèmes de la vie privée dans les positions et les revendications syndicales : crèches, prise en compte des familles monoparentales, contraception, avortement... », analyse Annie Massay, permanente syndicale Setca à l’époque, qui a activement soutenu la grève des ouvrières de la FN.1

Finalement, sous la pression de cette grande mobilisation, Willy Peers est relâché après 36 jours de détention préventive. À peine sorti de prison, il reprend son combat et est présent dans toutes les manifs pour le droit à l’avortement. Libéré le 20 février 1973, on le retrouve à peine quatre jours plus tard à la tête d’une manifestation à Liège, entouré de militantes, de personnalités scientifiques, de progressistes et de syndicalistes.

Même si c’est la fin de « l’affaire Peers », la lutte pour la dépénalisation commence à peine. En effet, bien que des propositions de loi aient vu le jour dès le début des années 1970, il faudra attendre 1990 pour que l’avortement soit enfin partiellement dépénalisé en Belgique. Et ce sera essentiellement le résultat d’une mobilisation acharnée du mouvement féministe et progressiste belge. Une fois de plus, l’histoire de cette lutte démontre que c’est avant tout dans la rue et par la mobilisation que se font les avancées sociales.

Le droit à l’avortement : un combat porté par le mouvement communiste

Willy Peers est souvent présenté comme un humaniste. Ce qu’on sait moins, c’est qu’il était également communiste. A 18 ans, il avait commencé à militer au Parti communiste de Belgique (PCB). Pendant la guerre 1940-1945, il rejoint la Résistance et, à partir de 1943, il fait partie des résistants armés. Toute sa vie, Peers restera fidèle à ses idéaux. S’il s’est tourné vers la médecine, c’était avant tout dans une visée sociale, expliquera-t-il dans son journal. Mais Willy Peers n’était pas le seul militant communiste à se battre pour le droit à l’avortement. C’est d’ailleurs au PCB que l’on doit la première tentative de sortir l’avortement du code pénal belge. En 1973, Noella Dinant, députée communiste, dépose un projet de loi pour autoriser les avortements en milieu hospitalier jusqu’à douze semaines de grossesse, et pour que ceux-ci soient remboursés par la sécurité sociale. Elle propose également d’abroger les articles 351 et 383 du Code pénal condamnant l’avortement et la contraception (revendication qui, dans le cas de l’avortement, est toujours d’actualité aujourd’hui).

On peut également citer l’exemple de Lucie Van Crombrugge, qui deviendra par la suite membre du PTB. Dans la deuxième moitié des années 1970, Lucie Van Crombrugge rejoint le Comité avortement de Gand et devient une militante très active pour la dépénalisation de l’avortement. En 2014, elle sera faite docteur honoris causa de la VUB en même temps que Willy Peers pour son rôle dans la lutte pour le droit à l’avortement en Belgique.

Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les pays socialistes ont été à l’avant-garde du combat pour le droit à l’avortement. Le premier État au monde à dépénaliser l’avortement n’est autre que... l’URSS, et ce dès 1920 (soit 70 ans avant la Belgique). Durant l’après-guerre, les pays de l’Est deviendront une destination privilégiée pour les femmes belges voulant avorter. On peut citer l’exemple de la Pologne, pays où ce droit est aujourd’hui menacé. Dans les années 1960-1970, beaucoup de femmes belges partaient en Pologne pour y obtenir un avortement dans de bonnes conditions. C’est ce qu’on appelait la « Polish Connection », comme en témoigne Anja Kiesjna, militante polonaise pour le droit à l’avortement, dans une récente vidéo.2

Un combat toujours d’actualité

Si le droit à l’avortement est un combat historiquement porté par la gauche et le mouvement communiste, il reste cependant tout à fait nécessaire.

En Belgique, l’avortement figure toujours dans le Code pénal, c’est-à-dire qu’il est toujours considéré comme un délit. Il s’agit pourtant d’une intervention médicale, et qui relève du droit des femmes à disposer librement de leur corps et à choisir si elles veulent devenir mères, et quand. Sortir l’avortement du code pénal est une revendication essentielle pour le droit des femmes à être libres et indépendantes.

C’est aussi une nécessité en terme de santé publique. Dans les pays où l’avortement est illégal, les avortements sont tout autant pratiqués, mais de manière clandestine. Ils se déroulent dans des conditions parfois dramatiques du point de vue de l’hygiène, sont effectués à l’aide par exemple d’aiguilles à tricoter ou de produits dangereux pour la santé. Interdire l’avortement n’en diminue pas le nombre mais ne fait qu’accroître le danger pour la santé des femmes qui y ont recours. C’est une des raisons pour lesquelles il faut prolonger le droit à l’avortement jusqu’à 20 semaines de grossesse.

Enfin, lutter pour le droit à l’avortement est une question de justice sociale. En effet, pour les femmes qui en ont les moyens, il sera toujours possible de se payer un voyage dans une clinique privée aux Pays-Bas ou en Angleterre. En revanche, pour les femmes qui ont moins de ressources, le droit à l’avortement, couvert par la sécurité sociale, est la seule protection pour bénéficier d’un système de santé de qualité et pour pouvoir donc réellement décider librement de son avenir.

Le Dr Willy Peers lors d'une manifestation interdite à Namur en 1973. (Photo DR)

Willy Peers, médecin communiste

Willy Peers était médecin gynécologue et militant communiste. S’il s’est tourné vers la médecine, c’est avec une vision sociale qui restera tout sa vie au cœur de sa pratique de médecin.

En 1964 est votée la loi Leburton, qui demande aux médecins de signer un contrat avec les mutuelles sur le tarif de leurs honoraires et de collaborer à la bonne marche de l’assurance maladie et invalidité. Sur les 10 000 médecins en exercice, seuls 500 acceptent le contrat. Les autres partent en grève pour protéger leurs privilèges. En revanche, le Parti communiste de Belgique soutient la loi, et le Dr Willy Peers refuse de faire grève. Selon lui, cette loi est une avancée sociale.

Willy Peers sera le défenseur d’une pratique collective et d’une vision globale de la médecine. Il sera notamment à l’origine du Groupe d’étude pour une réforme de la médecine (GERM), créé pour améliorer la pratique de la médecine.

La célèbre virologue Lise Thiry, également active dans ce groupe, se souvient : « Je nous revois par exemple, Maurice Goldstein, rescapé d’Auschwitz, aux côtés d’Elie Vamos qui susurre de douces suggestions révolutionnaires… (…) Puis, bien vite se joindra à nous le gynécologue Willy Peers qui apportera sa fougue et son courage. (…) Nos préoccupations concernèrent vite les relations du médecin avec son malade. (…) Le but se précisa, progressivement, vers une collaboration, en dehors de l’hôpital, entre médecins, infirmières, psychologues, voire d’autres, pour entourer au mieux un « client ». Au fil des années, notre projet se concrétisera. On parlera de « médecine de groupe ». Très vite, notre comportement déplaira vivement à l’Ordre des médecins. Selon lui, nous accordions trop de « confiance » à ceux qui n’avaient pas acquis assez de compétence, puisqu’ils n’avaient pas étudié pendant sept ans. Nous répliquions que les psychologues, les infirmières n’avaient pas acquis moins que nous, mais autre chose, d’additionnel. »3

Willy Peers devient un membre très actif du GERM. Il veut en effet une médecine plus en concertation avec le patient, qu’on doit accueillir dans sa globalité, y compris dans ses aspects socio-économiques. Cette vision sera directement à la base du concept des maisons médicales.

Un pionnier de « l’accouchement sans douleur »

Un autre aspect du travail social de Willy Peers est son engagement pour la méthode de « l’accouchement sans douleur ». À l’époque, la plupart des médecins soignent des maladies mais prennent rarement en compte les personnes (et encore moins les femmes). La douleur pendant l’accouchement n’était donc pas du tout une priorité pour la majorité des médecins.

Willy Peers fut l’élève du Pr Jean Snoeck, qui avait appris la méthode de l’accouchement sans douleur (ASD) à la maternité de la Clinique des métallurgistes du syndicat de la CGT à Paris. Cette technique, pratiquée par le docteur Fernand Lamaze, provenait directement de l’Union soviétique, où Lamaze avait voyagé avec une délégation de médecins français.

En Union soviétique, Lamaze découvre et retient plusieurs choses : souffrir en accouchant n’est pas une fatalité ; c’est une chose induite par tout un conditionnement négatif lié à notre éducation, aux rumeurs, à la religion – «Tu enfanteras dans la douleur»... ; le reconditionnement positif atténue cette douleur, par un accompagnement des femmes avant et après l’accouchement.

Cette méthode va complètement bouleverser l’histoire de l’accouchement en Occident. Willy Peers en sera l’un des pionniers en Belgique.

1. http://solidaire.org/articles/il-y-50-ans-la-greve-des-femmes-de-la-fn-herstal-nous-les-femmes-refuse • 2. https://www.facebook.com/events/1874890242789741/permalink/1879661278979304/?action_history=null • 3. http://www.maisonmedicale.org/Il-etait-une-fois-Le-GERM.html