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La crise climatique ne sera pas résolue par les multinationales

Power to the people. C’est avec ce slogan que le PTB participera à la grande manifestation climatique le 23 octobre à Bruxelles. En effet, l’explosion du prix de l’énergie et la crise climatique montrent qu’un grand plan d’investissements public et démocratique est plus que jamais nécessaire.

Vendredi 14 octobre 2022

La crise énergétique qui fait rage depuis plus d’un an ne fait pas que des malheureux. Les multinationales de l’énergie, qui ont bien profité de la libéralisation du marché énergétique européen, sont aujourd’hui à la fois les premiers responsables de l’impasse sociale, économique et climatique actuelle, mais aussi les premiers bénéficiaires. Leur réponse à la crise ? « TotalEnergies, EDF et Engie vous demandent de moins consommer », nous disent leurs PDG. Tandis que Esso vous demande de rouler moins vite. Comme si le problème était la consommation des gens.

Gaz de schiste, l’alternative polluante à la crise

De son côté, depuis le début de la guerre menée par la Russie en Ukraine, l’essentiel de la politique européenne vise à se passer au plus vite et par tous les moyens de l’énergie russe et en particulier du gaz. Alors, on rallume des centrales au charbon très polluantes et on cherche à acheter du gaz partout ailleurs.

Pour les monopoles étatsuniens, c’est une occasion en or. Le gaz de schiste américain arrive comme un sauveur pour l’Europe. Il est même rebaptisé « freedom gas ». Difficile à imaginer il y a quelques mois encore. La production américaine, plus chère que son équivalent russe, intéressait peu d’acheteurs. Surtout, le gaz de schiste avait mauvaise réputation. Et pour cause. Sa production est extrêmement polluante. Elle demande beaucoup d’énergie, d’eau et de produits chimiques pour casser la roche et libérer le gaz. Avec des conséquences irréversibles sur les nappes phréatiques, le sol et les habitants.

Maintenant, le marché européen est ouvert et les prix du gaz y ont été multipliés par dix. Les monopoles étatsuniens peuvent donc encaisser les bénéfices (17,9 milliards de dollars en trois mois pour ExxonMobil, par exemple). Les monopoles européens de l’énergie ne sont pas en reste. Engie, a récemment conclu un contrat avec un producteur américain de gaz de schiste pour l’achat de 1,75 million de tonnes pendant quinze ans. Le tout avec la bénédiction de nos autorités. La ministre de l’Énergie Tinne Van der Straeten (Groen) a récemment déclaré que le gaz russe pourrait facilement être remplacé par du gaz (de schiste) en provenance des États-Unis.

António Guterres, le secrétaire général des Nations unies, met le doigt sur le problème : « Alors que les plus grandes économies font tout leur possible pour se débarrasser des combustibles fossiles russes, elles risquent de prendre des décisions à court terme qui créent une dépendance à long terme à l’égard des combustibles fossiles. C’est une folie morale et économique » D’après l’ONG Natural Resources Defense Council, la hausse de la production et des exportations américaines de gaz pourraient à elles seules anéantir toute chance de limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C.

Le mouvement pour le climat doit veiller à ne pas tomber dans le piège de cette partie d’échecs géopolitique. Comme le déclare Joeri Thijs de Greenpeace : « Notre dépendance à l’égard des combustibles fossiles alimente les guerres et la crise climatique et nous impose des prix de l’énergie toujours plus élevés. Il serait irresponsable de se contenter de déplacer nos importations de fossiles russes vers davantage de pétrole d’Arabie saoudite ou de gaz de schiste polluant des États-Unis. Si nos gouvernements ne peuvent pas prendre des mesures draconiennes d’économie d’énergie en temps de guerre, de climat et de crise énergétique, quand le pourront-ils ? »

Power to the people

Aujourd’hui, Engie a plus de pouvoir que n’importe quel ministre de l’énergie. Si nous voulons faire baisser radicalement les prix de l’énergie, si nous voulons retrouver un prix et un approvisionnement stables, il n’y a qu’une seule chose à faire : nous devons retirer le secteur de l’énergie des mains des multinationales et en faire un bien public. De plus, la crise climatique impose, plus que jamais, une transition rapide vers les énergies renouvelables. Une planification minutieuse sera donc nécessaire pour relever ce défi. Là aussi, un contrôle public et démocratique est fondamental.

Du niveau européen au niveau local, nous voulons développer une alternative publique intégrée. Nous revendiquons la création d’entreprises publiques et démocratiques de production, distribution et stockage d’énergie du niveau européen, pour fédérer les pays autour de la Mer du Nord, jusqu’au niveau local. La maîtrise publique et le contrôle par les usagers et les travailleurs garantiront que les investissements sont menés dans les technologies et dans les lieux où ils sont les plus intéressants collectivement et pas là où ils sont les plus rentables individuellement.

Mais ce n’est pas tout. Comment s’assurer que des acteurs comme Engie, qui ont tout à perdre du développement d’une alternative publique et moins chère « jouent le jeu » alors qu’ils ont le pouvoir de plonger tout le pays dans l’obscurité ? Quelle naïveté d’espérer que Total laisse le pétrole et le gaz dans le sol et perde tous les profits que cela représente ? Cela ne peut réussir que s’ils n’ont pas d’autre choix. L’énergie est trop importante pour la laisser aux caprices de quelques PDG et à la cupidité des actionnaires. Reprenons le contrôle public sur les géants de l’énergie, pour socialiser les infrastructures que nous jugeons nécessaires à la transition climatique, comme les parcs éoliens ou les barrages, et pour fixer démocratiquement le rythme de fermeture des puits de pétrole ou de gaz. Si nous avons besoin de conserver d’anciennes centrales le temps de produire suffisamment d’énergie renouvelable, soyons propriétaires de ces centrales pour maîtriser leur coût et les fermer dès que possible. Faisons payer cette fermeture, le démontage et la gestion des déchets des centrales nucléaires et fossiles aux actionnaires privés des monopoles qui ont accumulé des milliards.

Des transports publics gratuits et performants

Répondre à la crise sociale et climatique, c’est aussi prendre des mesures pour réduire notre consommation d’énergie et offrir des alternatives aux gens écrasés par les pleins de carburant et les factures.
Le PTB lutte depuis des années pour faire baisser le prix des transports publics et offrir des transports gratuits dans les grandes villes. La crise actuelle rend cette revendication encore plus urgente. D’autres villes et pays nous montrent la voie. L’Allemagne, l’été dernier, avec des billets mensuels à 9 € pour voyager dans le tout le pays, Dunkerque, Calais ou Tallinn (Estonie) avec la gratuité complète des transports publics, nous montrent la voie à suivre. En Allemagne, selon le Cologne Institute for Economic Research, les tarifs réduits ont permis de limiter l’inflation de 2 %. Sur le plan environnemental, le « 9-Euro-Ticket », c’est 1,8 million de tonnes de CO2 en moins. À Dunkerque, suite à la gratuité, 24 % des déplacements en voiture se font désormais en bus.

Des transports en commun moins chers, c’est une mesure excellente pour les gens et l’environnement. Il est toutefois impératif d’investir dans le réseau, le matériel roulant et le personnel. Malgré les effets d’annonce, et comme vient de le confirmer l’accord budgétaire fédéral qui coupe dans les maigres investissements prévus, cette rupture, ce n’est pas la voie que prend le gouvernement fédéral. Alors, la lutte se poursuit. La grève du 5 octobre a encore démontré le combat des syndicats du rail pour de meilleurs transports publics. Nous sommes à leurs côtés. Et aux côtés des travailleurs et usagers de De Lijn, qui luttent contre un véritable sabotage de l’entreprise publique, de ceux des TEC et de la STIB qui veulent de meilleures conditions de travail et de nouveaux investissements. Des luttes exemplaires qui lient enjeux sociaux et climatiques.

Un plan d’isolation public

Que faire pour baisser notre consommation de gaz et de mazout et nos factures de chauffage ? La plupart des réponses de nos gouvernements reviennent à abandonner les gens à la loi de la jungle, à la loi de l’offre et la demande. « Isolez vous-mêmes votre maison », « Éteignez le chauffage » ou encore « Cherchez le meilleur fournisseur vous-mêmes ». Résultat, on arrive péniblement à isoler 1 % des bâtiments belges chaque année. Et tant pis pour les habitants et pour le climat. Les enjeux sont pourtant clairs : le chauffage représente 40 à 50 % de notre consommation de gaz et nous devons isoler les bâtiments trois fois plus vite pour respecter nos engagements climatiques.

De nouvelles recherches montrent qu’un soutien accru à l’énergie solaire et à l’isolation des bâtiments pourrait réduire notre consommation de gaz d’un quart au cours des trois prochaines années. Pour mener cela à bien, c’est d’un plan collectif d’investissement dont nous avons besoin. Pour mener les travaux rapidement sans faire payer les gens, pour commander les matériaux en quantité et en contrôler le prix, pour former les travailleurs nécessaires et créer des milliers d’emplois dans la rénovation et les usines nécessaires à la production des matériaux. Une initiative publique de grande ampleur pour faire baisser les factures, soutenir notre industrie et ses travailleurs et réduire notre dépendance aux énergies fossiles.

Soyons nombreux dans les rues pour le climat, pour la paix et contre la dictature des monopoles

« Ça va vous surprendre, mais à un certain moment, la planète passe en second ordre, là, il y a une guerre. C’est clair que la guerre, ça détruit l’environnement, mais il faut qu’on y aille », disait Olivier Deleuze, membre fondateur et ancien co-président d’Ecolo en mai 2022. Alors, est-ce le moment de manifester ? Oui, plus que jamais !

Peu de temps après l’invasion de l’Ukraine, un nouveau rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a été publié. L’alarme lancée par les climatologues a été largement noyée dans le vacarme de la guerre. La situation est extrêmement grave. Les émissions annuelles moyennes mondiales ont augmenté de 12 % par rapport à 2010. Les scientifiques pensent que les scénarios qui nous éviteraient un réchauffement moyen de moins de 1,5 °C deviennent de plus en plus compliqués à atteindre. Ce seuil, c’est celui à partir duquel on parle d’un changement incontrôlable du climat. Déjà, les glaciers fondent, les récifs coralliens sont à l’agonie, les espèces végétales et animales disparaissent, les personnes meurent à cause des mauvaises récoltes, de la surchauffe, des catastrophes…

Pourtant, la guerre risque de reporter encore les efforts climatiques de nos gouvernements déjà totalement insuffisants. L’année dernière, les dirigeants mondiaux ont dépensé plus de 2000 milliards de dollars dans l’activité militaire et n’ont investi que 750 milliards dans la lutte climatique. Les pays riches n’ont même pas réussi à trouver les maigres 100 milliards qu’ils ont promis pour soutenir les pays en développement dans leur transition climatique. Suite à la guerre en Ukraine, nos gouvernements veulent encore augmenter leurs budgets militaires. L’Allemagne a décidé de consacrer 100 milliards supplémentaires aux dépenses militaires. Le gouvernement Vivaldi met également à cet effet 14 milliards supplémentaires sur la table. Il y a plus de dix ans, Ban Ki-moon, alors secrétaire général des Nations unies, déclarait : « Le monde est surarmé et la paix est sous-financée. » Malheureusement, cette déclaration est toujours d’actualité.

Contrairement aux propos d’Olivier Deleuze, il donc plus qu’urgent et nécessaire de se mobiliser pour une politique climatique à la hauteur des enjeux. Une revendication qui doit passer un discours de paix et qui vise les vrais responsables et profiteurs de la crise actuelle.

Si nous voulons ne plus dépendre de sources d’énergies polluantes et impayables, il n’y a qu’une seule chose à faire : nous devons retirer le secteur de l’énergie des mains des multinationales. Nous avons besoin d’un plan public et démocratique, pour orienter les investissements vers ce dont la société a réellement besoin : les énergies renouvelables et l’isolation, les transports publics, l’approvisionnement public en eau, des soins de santé solides, un enseignement de qualité et tous les autres besoins sociaux. C’est une lutte contre des intérêts puissants. Nous ne pouvons la gagner qu’avec un large mouvement social et climatique mobilisé. Qui unit les forces des syndicats, du mouvement pour la paix et du mouvement pour le climat. C’est pour cela que nous serons nombreuses et nombreux dans la rue, à leurs côtés, le 23 octobre à Bruxelles. Et que nous continuerons à nous mobiliser.