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Depuis 70 ans, un « être humain » égale un « être humain »

"Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits." C'est ce qu'a proclamé il y a 70 ans la Déclaration universelle des droits de l'homme. Fini de réserver le droit de vote uniquement aux plus riches. Fini de considérer certains êtres humains comme inférieurs en droit. Cette déclaration est révolutionnaire. Elle consacre même les congés payés, la sécurité sociale ou le droit à la santé. C'est sans doute pour cela qu'elle est tellement malmenée.

Lundi 10 décembre 2018

La Déclaration universelle, résultat de la victoire sur le fascisme

70 ans plus tard, le texte a très peu perdu de son actualité. Mieux encore : il est plus actuel que jamais.

La Déclaration universelle était une réaction aux horreur de la Seconde Guerre mondiale. Son contenu nous donne un important regard sur les leçons que l'on avait tirées à l'époque d'une société qui avait totalement déraillé. Trois ans après la victoire sur l'Allemagne nazie, le monde faisait un sort à l'antisémitisme, aux théories racistes d'Hitler et à sa politique belliqueuse. L'épouvante suscitée par l'Holocauste a été déterminante dans l’avènement de cette Déclaration. La conscience existait parmi toutes les nations représentées à l'ONU que cela ne pouvait plus jamais se produire. Les articles sur l'égalité de tous les êtres humains, le droit au travail et à un « salaire égal pour un travail égal » le droit à l'enseignement ou la liberté de culte... tous ont trait directement à la protection nécessaire contre les discriminations que les nazis avaient prises contre les juifs dans les années 1930. 70 ans plus tard, le texte a très peu perdu de son actualité. Mieux encore : il est plus actuel que jamais.

Le droit de vote n’est plus réservé qu’aux riches

L'idéal de société qu'exhalte le texte a été le signe avant-coureur du mouvement de décolonisation.

C'est très consciemment que les rédacteurs ont qualifié la déclaration d'« universelle ». Les droits de l'homme s'adressent à « tous les membres de la famille humaine », lisons-nous dans la première phrase du préambule. Désormais, le droit de vote n’est plus réservé uniquement aux riches citoyens de sexe masculin, mais à tout le monde. Désormais, le travailleur pourra s'organiser – exactement à l'instar de son patron – dans des associations et fonder des syndicats. Et ces droits humains valent pour tous, y compris les migrants. L'idéal de société qu'exhalte le texte a été le signe avant-coureur du mouvement de décolonisation au cours des décennies qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale. Dans le sillage de la Déclaration est venue la Déclaration sur la décolonisation de l'Assemblée générale de l'ONU, en 1960, de même que la Déclaration sur l'interdiction de la discrimination raciale, en 1963.

En 1948, la sécurité sociale devient un droit de l'homme

Dans les articles 1 à 21 sont formulés les droits civils et politiques classiques : l'interdiction de l'esclavage, le droit à la liberté de pensée et d'expression, le droit à un juge indépendant, le droit à participer aux élections ... Précédemment, tous ces droits avaient déjà été repris aussi dans d'importants textes et constitutions. Mais la Déclaration universelle des droits de l’homme étend fortement leur portée des droits humains. Suite à la montée du mouvement ouvrier et au message mobilisateur du socialisme, des droits économiques, sociaux et culturels sont également repris. Ces nouveaux droits sont la deuxième génération des droits de l'homme. Le texte constituait une extension énorme des droits de l'homme pour toute la population mondiale.

Un texte au potentiel révolutionnaire

Le texte engage à tendre vers une société dans laquelle ces droits pourront être concrétisés au maximum. Ils donnent un sens à la mise sur pied de rapports de force et de luttes sociales afin d’arracher ces droits. La DUDH était une concession des pouvoirs existants aux masses populaires qui s’étaient organisées dans la résistance au fascisme et pour qui le socialisme avait un grand pouvoir attractif.

Implicitement, les signataires reconnaissent donc le droit à la révolte quand les droits ne peuvent plus être pleinement réalisés.

L'article 28 de la Déclaration universelle comprend le droit à une société saine. L'article dit ceci : « Toute personne a droit à ce que règne, sur le plan social et sur le plan international, un ordre tel que les droits et libertés énoncés dans la présente Déclaration puissent y trouver plein effet. »

Cet article doit être lu conjointement avec le troisième paragraphe du préambule de la Déclaration universelle : « Considérant qu'il est essentiel que les droits de l'homme soient protégés par un régime de droit pour que l'homme ne soit pas contraint, en suprême recours, à la révolte contre la tyrannie et l'oppression... » Il rappelle un principe de droit coutumier qui rend légitime la résistance contre un régime d'oppression ou contre un dirigeant inique. Implicitement, les signataires reconnaissent donc le droit à la révolte quand les droits et libertés ne peuvent plus être pleinement réalisés. Ces dispositions confèrent à la Déclaration universelle un potentiel révolutionnaire. 

Les droits humains sous le feu

Le combat idéologique pour les droits de l'homme est loin d'être gagné. L'actualité nous le montre chaque jour. Dans le monde entier, depuis Trump aux États-Unis à Francken chez nous, en passant par Bolsonaro au Brésil, le roi Salmane en Arabie saoudite ou encore Salvini en Italie, on assiste à une résurgence de courants politiques qui remettent en question la pensée égalitaire, le contenu social et l'universalité de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Ce n'est pas un hasard si, dans son livre Continent sans frontières, Theo Francken s'en prend à ce qu'il qualifie de « fondamentalisme des droits de l'homme » de la Cour européenne des droits de l'homme.

Dans les discours contre les migrants, les êtres humains sont déshumanisés.

Les droits de l'homme s'appuient sur une pensée fondamentalement égalitaire. Celle-ci subit de fortes pressions et cela ressort particulièrement de la discussion autour de la Pacte migratoire de l'ONU. À la base, les adversaires de ce pacte ne perçoivent pas les migrants comme des égaux. Dans leur discours contre les réfugiés et les migrants, les êtres humains sont déshumanisés.

Bien que, sur le plan économique, le monde soit davantage un village au sein duquel les diverses économies sont étroitement entremêlées, le nationalisme politique et économique est fortement de retour. L'idée des droits de l'homme est remplacée par le concept primitif du « chacun pour soi ». Avec la déshumanisation des migrants, il s'agit d'un cocktail dangereux. Le combat pour les droits de l'homme est donc tout sauf gagné.

Les droits de l'homme nous font réfléchir à une autre société

La Déclaration universelle est un beau texte. Mais ce n'est pas parce que ces droits ont été mis sur papier il y a 70 ans dans une déclaration officielle qu'ils sont devenus réalité aujourd'hui. Au contraire.

Le contraste entre les droits de l'homme et la réalité revêt aujourd'hui des proportions gigantesques. 

Le contraste entre les droits de l'homme et la réalité revêt aujourd'hui des proportions gigantesques. Cela s’exprimer particulièrement dans l'extrême inégalité qui existe aujourd’hui ou dans la crise du climat. D'un rapport d'Oxfam-Solidarité, il ressort que les 85 personnes les plus riches de la planète possèdent autant que la moitié la plus pauvre de la population mondiale. Un pour cent de cette même population mondiale possède autant que les 99 autres pour cent. La crise du climat pousse la survie de la planète vers l'abîme. Au cours des prochaines décennies, ce seront surtout la classe ouvrière et les pays pauvres qui en seront les victimes.

En fait, la Déclaration universelle est un appel à se mettre en quête d'une société dans laquelle les droits humains peuvent bel et bien être réalisés. La crise sociale, écologique et économique montre à suffisance la nécessité de sortir de cette course au profit effrénée du capitalisme. La planète est mise sous pression par cette économie qui ne tourne qu’en vue d’accroitre les bénéfices d’une minorité. Ces crises amènent à penser qu'un monde ne peut plus fonctionner en vertu du dogme du droit sacro-saint à la propriété à tout prix.

Les nombreux développements techniques d'aujourd'hui font qu'il est bel et bien possible de transformer les droits de l’homme en réalité. Mais l'écart croissant entre la réalité sociale et les droits de l'homme sur papier montre clairement que, pour ce faire, la société doit changer fondamentalement. Le capitalisme mondial crée chaque jour des polarisations plus grandes entre riches et pauvres, entre l'homme et la nature. Il n'est pas en état, par définition, de réaliser la valeur de base qu'est la justice, l'équité. Pour que se réalisent les idéaux de 1948, nous devons oser remettre la société fondamentalement en question. C'est également l'un des mérites de ce texte écrit voici 70 ans.

La version officielle de la DUDH est disponible ici.