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Pourquoi les autorités politiques attaquent la société civile

La société civile est attaquée. Ceux qui se montrent trop critiques doivent en payer le prix et, de manière générale, les moyens sont réduits. Est-ce seulement pour faire des économies, ou y a-t-il d’autres raisons à cela ? Asphyxier financièrement la société civile, c’est porter atteinte au cœur même de notre démocratie.

Vendredi 26 décembre 2025

Action contre la loi anti-manifestation en 2023. Des militants vêtus d'uniformes de prisonniers brandissent des pancartes : « Criminel ? Non, syndicaliste ».

Les différents niveaux de gouvernement – du fédéral au local en passant par le régional – s'en prennent à notre société civile. Or toutes ces organisations sociales et associations où les citoyens peuvent s’exprimer font un travail essentiel.

Ce qui est en jeu dépasse donc largement la question des subsides accordés à certaines organisations. En tarissant les ressources de la société civile, on touche au cœur de notre démocratie : l’espace de la libre expression, de l’organisation et de la promotion d’une citoyenneté critique. La liste des mesures annoncées est longue :

  • La Fédération Wallonie-Bruxelles a décidé de ne pas indexer les subsides existants et de réduire les fonds destinés à la formation permanente et aux associations de jeunesse et culturelles.
  • Le « Plan de cohésion » wallon devient plus strict, ce qui rend la lutte contre les inégalités et la pauvreté plus difficile. Certains services gratuits deviennent partiellement payants.
  • Au niveau local, les autorités communales coupent dans les services sociaux : Charleroi réduit l'aide aux associations. À Gand, le CPAS supprime des projets destinés aux mamans solos. Le conseil communal d'Anvers a décidé d'économiser 3 millions d'euros par an sur le travail social dans des quartiers, en donnant moins d'argent aux organisations de lutte contre la pauvreté.
  • Le gouvernement flamand intervient dans le financement de certaines organisations trop critiques pour la politique, même si elles ont reçu un avis positif de la commission d'évaluation. Des organisations bien connues telles que Vrede, De WereldMorgen ou Labo vzw, voient leurs subsides réduits de moitié, voire retirés. Elles craignent pour leur survie.
  • Le gouvernement fédéral veut s’arroger le droit de dissoudre une association s’il la juge « radicale ».

Briser le contre-pouvoir

L'attaque contre la classe travailleuse bat son plein : nos pensions, l'enseignement, les services sociaux et la culture sont dans le viseur. Le mot d'ordre : sabrer dans la sécurité sociale pour investir davantage dans la militarisation. 

Heureusement, la résistance vit parmi les syndicats et la société civile, qui s'opposent au gouvernement De Wever-Bouchez et aux autres gouvernements. Depuis plus d'un an, la classe travailleuse descend dans les rues avec le soutien d'associations socioculturelles. Le point culminant de la résistance a été la grande manifestation syndicale du 14 octobre, qui a rassemblé 140 000 manifestants, dont de nombreux jeunes, bénévoles et employés d'organisations sociales et culturelles. 

Les gouvernements veulent briser ce contre-pouvoir en prenant une série de mesures disciplinaires. De cette manière, ils veulent paralyser la société civile, afin de faciliter la mise en œuvre de leurs politiques antisociales.

La loi Quintin (ministre de l'Intérieur) au niveau fédéral prévoit une procédure accélérée pour la dissolution administrative d'une association. Derrière des termes tels que « sécurité nationale » et « prévention contre le radicalisme » se cache un mécanisme qui permettrait à l'exécutif d'interdire des associations sans l'intervention d'un tribunal. Cela va directement à l'encontre de l'article 27 de la Constitution : le droit d'association.

En Flandre, le ministre Ben Weyts a introduit en octobre une règle visant à interdire aux organisations qui reçoivent des subsides d’utiliser ceux-ci pour financer des procès contre le gouvernement flamand.

Ce même gouvernement a également présenté un plan d'action contre la radicalisation violente, donnant aux ministres le pouvoir de supprimer les subsides à toute organisation de la société civile sur la seule base de « soupçons d'implication dans l'extrémisme ».

L'accord de gouvernement fédéral 2025-2029 contient aussi plusieurs mesures visant à limiter la liberté de protestation. Notamment la possibilité pour les juges d'imposer une interdiction de manifester aux citoyens.

Avec cette approche, nos gouvernements veulent inciter les organisations à s’autocensurer. Ils veulent les dissuader de s'opposer au gouvernement. La citoyenneté critique et les petits actes de résistance positifs peuvent entraîner des mauvais rapports avec les autorités. La peur d'être arrêté ou de perdre ses subsides fait partie des moyens de dissuasion.

« Applique et tais-toi »

Les mesures antisociales annoncées par le gouvernement Arizona (saut d’index, coupes dans les services publics, augmentation de la TVA) vont mener à une augmentation de la pauvreté dans la société. Le gouvernement investit de moins en moins dans le soutien aux personnes en difficulté. Une fois de plus, ce sont les organisations de la société civile qui devront prendre sur elles pour aider les gens, alors qu’elles croulent déjà sous le travail.

Les partis de la majorité tentent de plus en plus de réglementer les subsides et de les conditionner aux résultats qu’ils veulent atteindre. Ainsi, la société civile devient un exécutant « forcé » des politiques gouvernementales. Elle a le droit d’appliquer, mais pas de critiquer.

Les organisations entrent ainsi progressivement en mode survie, ce sur quoi comptent les différents gouvernements. La société civile est tolérée quand elle éteint les incendies, mais devient indésirable dès qu’elle rassemble les citoyens pour défendre des politiques plus sociales.

Les organisations pour la paix, les organisations de jeunesse et les associations culturelles sont particulièrement visées. Des organisations comme Vredesactie et Vrede vzw, qui s'opposent à la nouvelle course aux armements et à la militarisation en Belgique et dans le monde, perdent la quasi-totalité de leurs subsides flamands. Le tandem N-VA-Vooruit sanctionne ceux qui osent contester le ministre de la guerre Theo Francken. 

Le gouvernement wallon du MR et des Engagés a annoncé qu'il allait réduire progressivement les subsides aux associations de jeunesse et aux associations culturelles. Quarante organisations de jeunesse, telles que la fédération des étudiants francophones (FEF) et les Jeunes FGTB, vont être impactés.

En outre, le MR et Les Engagés veulent aussi réduire les subsides accordés aux organisations de jeunesse « explicitement liées à des partis politiques ». Tout cela signifie la fin du financement structurel pour toute une série d'organisations politiques de jeunesse. L’establishment veut faire disparaître les voix critiques du débat.

La Belgique, pays de la société civile

La Belgique a une très forte tradition en matière d’organisations de la société civile. Elles créent du lien entre les citoyens, les unissent et jouent un rôle dans la vie sociale. Travailler ensemble, ça marche.

Aujourd'hui, nous sommes confrontés à un changement. C'est ce rôle traditionnel de la société civile que les partis de droite veulent limiter, réduisant ainsi la démocratie. Le Premier ministre De Wever parle de « primauté du politique ». Pour lui, les mandataires politiques sont les décideurs ultimes qui gouvernent et se trouvent au-dessus des organisations de la société civile. Les syndicats, les ONG et les organisations socioculturelles ont moins leur mot à dire. Ils constituent des obstacles à une mise en œuvre efficace des politiques.

Pour faire accepter cette vision au grand public, la N-VA dépeint ces organisations comme profiteuses ou inutiles. Le CD&V, Les Engagés et Vooruit, des partis qui avaient autrefois leurs racines dans ces mouvements populaires, surfent aujourd'hui sur cette logique d'austérité. Sous prétexte que « sans nous, ce serait pire », ils participent au démantèlement de la société civile critique.

Dans cette vision, les organisations de la société civile finiront par se transformer en associations qui se contentent de suivre les règles et de faire ce qu'on leur demande. Le caractère émancipateur visant à améliorer collectivement la société disparaît. Les travailleurs sociaux ne servent plus qu’à aller chercher les pauvres dans les rues et à les occuper dans une maison de quartier. Et surtout, ne pas poser la vraie question : comment les pauvres se retrouvent-ils dans une telle situation ?

Une résistance polyvalente

Pour le PTB, la société civile mérite du respect et un soutien durable. Ces organisations sont expertes dans leur domaine. Elles identifient les problèmes, offrent de l'aide, renforcent les gens et les rassemblent. Ce sont des piliers fondamentaux de notre société.

Et elles ne se laissent pas intimider. En Flandre, à Bruxelles, en Wallonie, partout, la résistance grandit.

  • Le groupe « Droit de protester » (une collaboration entre Amnesty International et d'autres organisations de défense des droits humains, des syndicats, Greenpeace et des associations sociales) se mobilise et lance une action en justice contre la loi antidémocratique du ministre Quintin.
  • Des organisations flamandes qui ont injustement perdu des subsides du gouvernement flamand saisissent le Conseil d'État, soutenues par leur campagne « Tegenmacht » (Contre-pouvoir).
  • Des organisations de la société civile anversoise se sont réunies le 15 décembre pour protester contre les coupes opérées par le collège communal dans le secteur socioculturel et dans la politique de lutte contre la pauvreté. Le même jour, une grande manifestation a eu lieu à Bruxelles, qui a réuni 7 000 participants, parmi lesquels des enseignants, des travailleurs de l'enfance, des travailleurs dans la jeunesse, des étudiants et des travailleurs du secteur culturel. Partout dans le pays, la revendication est la même : « Nous voulons un avenir ! Non à l’austérité. »
  • Des organisations wallonnes menacées de perdre leurs subsides (restaurants sociaux, refuges pour sans-abri, « Infirmières de rue ») ont lancé des campagnes de sensibilisation et de financement participatif (crowdfunding).
  • En Flandre, « De Federatie », qui regroupe les organisations socioculturelles, a mené une action sectorielle au Parlement flamand le 17 décembre.
  • Des organisations étudiantes ont mené des actions contre l'augmentation annoncée des frais d’inscription et l'introduction/l'augmentation d'une taxe sur les kots étudiants à Louvain et à Gand. 

La force de la résistance réside dans sa polyvalence : de l'association culturelle chrétienne à l'organisation de défense des droits humains, de l'aide aux devoirs à la désobéissance civile, de l’occupation temporaire de bâtiments vides à la plate-forme pour les personnes aveugles et malvoyantes, des actions féministes aux services aux personnes âgées. Une diversité qui se renforce mutuellement.

Sa force réside également dans la collectivité : ensemble, nous sommes plus forts.

La société civile peut compter sur notre soutien dans sa protestation contre ces plans et dans sa lutte pour un large espace démocratique où les gens ont véritablement voix au chapitre.

Les organisations ont droit à l'indépendance pour jouer leur rôle essentiel de voix critique. La reconnaissance structurelle et un financement transparent et stable sont essentiels à cet égard.