Les événements du 6 janvier dernier à Washington resteront gravés dans les mémoires. Alors que le Congrès (Parlement) s’apprêtait à certifier la victoire du nouveau président, Joe Biden, des sympathisants pro-Trump se rassemblaient à l’extérieur du siège du Congrès, le Capitole. Une foule de manifestants est parvenue à franchir un cordon de sécurité étonnamment maigre, pour s’introduire dans le bâtiment.
Il ne s’agit pas d’un coup d’État ou d’un soulèvement, comme certains le prétendent, mais d’une manifestation inquiétante de l’essor de l’alt-right, ce mouvement d’extrême droite né sur Internet, aux États-Unis. Ce n’est pas seulement la dernière convulsion d’un Trump à deux doigts de devoir lâcher le pouvoir, mais une nouvelle étape dans la fascisation de la société américaine. Pour venir à bout de ce mouvement, il faut une alternative sociale ambitieuse, impliquant tout le peuple des États-Unis, visant à éradiquer les profondes inégalités à la racine.
Un incident bien orchestré
Les événements du 6 janvier sont tout sauf spontanés. Le chemin qui y mène a été soigneusement tracé par nul autre que le président Donald Trump lui-même. Avant même que les citoyens ne se rendent aux urnes, il avait prévenu qu’en cas de défaite, il ne fallait pas s’attendre à une passation de pouvoir pacifique. Dès la nuit des élections, le 3 novembre, il commençait déjà à exprimer des soupçons de fraude. Depuis lors, il n’a cessé d’enfoncer le clou et a tout fait pour inciter ses partisans à converger vers le Capitole, le 6 janvier. Juste avant la manifestation, il leur a dit : « Faites en sorte que ce jour devienne historique. »
L’intention de Donald Trump était de créer un précédent. Lorsque les activistes qui étaient entrés dans le Capitole en ont été expulsés, ils sont sortis en vainqueurs et non en vaincus. Trump a peut-être perdu les élections, mais, ici, il a marqué des points.
Comme lors de la manifestation de l’extrême droite à Charlottesville en 2017, où une militante antifasciste avait été tuée, des milices et des groupes d’extrême droite organisés ont pris la tête. Mais d’après les images et les diverses interviews, il semble qu’en excitant les gens en se servant de leur frustration, Trump a également réussi à attirer un public plus large. Malgré la haine et la division qu’il a semées, malgré sa gestion désastreuse de la pandémie de coronavirus, Trump a gagné des partisans. Il a obtenu 74 millions de voix lors de la présidentielle de novembre 2020. C’est 12 millions de plus qu’en 2016. La complaisance des services d’ordre vis-à-vis des manifestants laisse penser qu’il est également bien soutenu par l’appareil d’État.