Photo Noushad Thekkayil
Que faire ?
Il y a beaucoup de bonnes raisons de critiquer ce qui se passe au Qatar. Et il y a de bonnes raisons de s’opposer à l’envoi de nos responsables politiques sur place (qui, de toute façon, n'y vont que pour se pavaner aux côtés des Diables rouges). Mais les appels tardifs au boycott des spectateurs ne sont pas forcément le plus productif. Qu’on le veuille ou non, cette Coupe du monde aura lieu et des centaines de millions (et même milliards) de gens vont la regarder et la vivre intensément. Plutôt que de pointer du doigt ceux-ci (qui n'ont aucune responsabilité dans la situation), l’enjeu est d’arriver à cibler les vrais responsables et de les toucher là où ça fait mal. Il y a des initiatives positives à soutenir dans ce sens.
Ciblons les vrais coupables : la FIFA et le Qatar...
Les syndicats et des organisations de défense de droits humains ont lancé une campagne visant à faire payer la FIFA et le Qatar sous le nom #PayUpFIFA. Celle-ci vise à faire indemniser les familles des ouvriers. La FIFA devrait réserver un montant minimum de 420 millions d’euros – soit la somme que la FIFA versera aux équipes qualifiées – afin de fournir des réparations aux centaines de milliers de travailleurs migrants ayant subi des violations des droits humains au Qatar lors des préparatifs pour la Coupe du monde 2022, selon les organisateurs de la campagne. Outre cela, et vu les pratiques mafieuses de certaines compagnies, syndicats et associations demandent aussi que les salaires soient effectivement versés aux travailleurs qui attendent parfois des mois avant de toucher leur misérable paie.
On estime à 6 milliards de dollars les bénéfices nets que va se faire la FIFA sur cette compétition. Touchons donc ces bénéfices, véritable moteur du foot-business actuel.
Une grosse majorité de la population soutient dʼailleurs cette initiative : un sondage réalisé en septembre dernier montre que plus de trois quarts (77 %) des personnes interrogées en Belgique sont en faveur de l’indemnisation par la FIFA des travailleurs migrants qui ont souffert pendant la préparation de la Coupe du monde 2022 au Qatar, « avec un soutien encore plus marqué chez les personnes susceptibles de regarder au moins un match de ce tournoi (85 %) ».
... ainsi que « nos » multinationales
Nʼoublions pas de cibler les entreprises qui se font des profits gigantesques en exploitant les travailleurs au Qatar… et ici. Quelles sont ces grosses entreprises ? Les géants français Bouygues, Vinci, mais aussi le belge Besix. Ce dernier se vante même des conditions sur leur chantier au Qatar : « Dans de nombreux cas, notre bilan de sécurité local y est souvent meilleur que partout ailleurs dans le monde, y compris en Europe », expliquait la direction du géant du béton dans lʼEcho du 13 juillet 2021. De qui se moquent-ils ?
Ouvrir les yeux et dénoncer
Outre les syndicats et les organisations de défense des droits humains qui veulent profiter du mondial pour mettre un coup de projecteur sur le système qatari, dʼautres défendent cette optique. Comme le média français d'investigation Mediapart, qui sʼen expliquait le 2 octobre dernier : « Que le Mondial de foot se joue au Qatar ou ailleurs, l’exaspération démocratique et sociale face à la crise climatique et à l’inégalité des richesses impose aux grandes compétitions de changer de modèle. Il faut documenter et dénoncer la confiscation du football par des instances sportives et politiques ultralibérales. En espérant que les prises de conscience changeront enfin le cours des événements sportifs. »
Ou le magazine français So Foot : « La tendance est assez similaire à ce qu’il est possible d’entendre au sujet de l’écologie. Il s’avère toujours tellement plus facile de réclamer au "péquin" (individu, NdlR) de prendre ses responsabilités envers la planète – tri sélectif, acheter un vélo, etc. – que d’imposer au niveau "macro" – État, entreprises – des décisions douloureuses pour le portefeuille. »