Aurélie Decoene travaille au service d’études de Médecine pour le Peuple. Serima Tebbache est pédiatre et a tiré en 2021 la grève des médecins assistants pour de meilleures conditions de travail.
Gesundes Kinzigtal, c’est quoi?
« Gesundes », ça veut dire « en bonne santé ». Kinzigtal, c’est le nom de la région. Une région rurale de 80.000 habitants où les médecins travaillent autrement. Leur ambition? Rendre la population en meilleure santé. Ça passe entre autres par éviter que les gens ne tombent (vraiment) malades. C’est ce qui s’appelle investir dans la prévention. Car ils en sont convaincus: 90% des problèmes de santé peuvent être résolus en dehors de l’hôpital.
Plus de prévention, moins de ministres
Vouloir éviter que les gens ne tombent malades, ça a l’air évident dit comme ça. Mais le système de santé en Belgique ne fonctionne pas dans cet objectif. Un exemple: les médecins et les hôpitaux sont payés en fonction du nombre de consultations et d’examens qu’ils réalisent, pas en fonction de leurs résultats. Cela conduit à du gaspillage et ne stimule pas à prévenir les maladies. Les investissements pour empêcher que les gens ne tombent malades sont aussi ridiculement bas. Pour l’ancien député N-VA Lorin Parys, devenu patron de la Pro League de football, la raison est la suivante: “C’est évidemment parce que chaque euro investi (par la Flandre) dans la prévention profite au fédéral.” Absurde. Avoir neuf ministres de la santé, voilà où ça nous conduit. Ça doit changer.
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1. Le projet
Étape 1 : se connaître et travailler ensemble
Le projet commence en 1992, quand quelques médecins de la région de Kinzigtal décident de s’associer pour rendre le système de santé plus efficace. Comme beaucoup de généralistes en région rurale, la charge de travail est colossale. Chacun travaille dans son coin, 7 jours sur 7, d’urgence en urgence. Peu ou pas de vacances. Résultat: le métier ne donne pas envie et les jeunes médecins préfèrent souvent déménager en ville.
En collaborant les uns avec les autres, ils apprennent les points forts de chacun, se répartissent les gardes, etc. Un des médecins fondateurs nous raconte: « On s’est à un moment rendu compte que les résidents des maisons de repos qui étaient envoyés à l'hôpital l’étaient le plus souvent entre 19h et 21h. Pourquoi ? Parce que les médecins généralistes sont peu disponibles à cette heure et que les soignants en maisons de repos voyaient souvent comme seule solution d’appeler une ambulance. » Ils mettent alors deux solutions en place : ils créent un numéro de garde appelable en soirée jusqu’à 21h et ils créent des protocoles en collaboration avec les soignants des maisons de repos pour définir la prise en charge nécessaire en fonction des problèmes rencontrés.
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