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Arrêter la militarisation ici pour stopper la machine génocidaire israélienne

L’armée et l’industrie militaire israéliennes sont une extension du complexe militaro-industriel américain et européen. Arrêter la militarisation chez nous, c’est enrayer la machine génocidaire israélienne.

Vendredi 17 octobre 2025

Un panneau “Stop Arming Israël” dans une manifestation pour la Palestine.

Texte de David Pestieau.

Les États-Unis constituent le pilier incontournable de la capacité militaire israélienne. Entre 2019 et 2023, 69% des équipements militaires importés par l‘armée israélienne Tsahal provenaient des États-Unis, selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI).1 Cette relation ne relève pas du simple partenariat commercial : elle s'inscrit dans un accord structurel garantissant une aide militaire annuelle de 3,8 milliards de dollars, destinée à préserver ce que Washington qualifie d'« avantage militaire qualitatif » d'Israël face à ses voisins.

L'expert Andrew Feinstein, spécialiste du commerce mondial des armes, souligne la nature quasi-existentielle de cette intégration israélienne dans le complexe militaro-industriel états-unien. L'infrastructure militaire israélienne est tellement imbriquée avec le matériel américain qu'elle nécessite un flux constant de pièces détachées, composants et munitions en provenance des États-Unis pour rester opérationnelle. Selon son analyse, un arrêt complet des ventes d'armes américaines aurait paralysé l'assaut sur Gaza en quelques jours seulement, Israël ne pouvant simplement pas remplacer ces armes par d'autres sources tant son système militaire est structurellement dépendant du matériel américain.2

L'Allemagne, deuxième fournisseur stratégique

L'Allemagne représente le second pilier des importations militaires israéliennes, avec 30 % des importations d'armes selon le SIPRI. Cette relation s'est intensifiée depuis le début du génocide en 2023, avec des livraisons accrues de munitions, véhicules terrestres et équipements antichars.1 Le nouveau gouvernement Merz (le gouvernement fédéral allemand en place depuis le 6 mai 2025 et dirigé par le chrétien-démocrate Friedrich Merz) a poursuivi cette politique : en seulement cinq semaines entre mai et juin 2025, près de quatre millions d'euros de licences d'exportation d'armements ont été accordées à Israël.3

Les exportations allemandes se distinguent par leur nature technique : plutôt que des systèmes d'armes complets, l'Allemagne fournit des pièces détachées, composants électroniques, logiciels, éléments de défense aérienne, technologies navales, moteurs diesel pour chars et sous-marins, torpilles et munitions. Ces éléments constituent l'épine dorsale logistique permettant à la machine de guerre israélienne de fonctionner.

Israël, partie intégrante de la chaîne d’approvisionnement militaire occidentale 

Le cas britannique des F-35 révèle une autre dimension critique. Le Royaume-Uni produit 15 % de chaque F-35, utilisé notamment lors de frappes meurtrières à Gaza ayant causé plus de 90 morts en juillet 2024 dans une prétendue « zone de sécurité ».6

La Belgique a aussi sa part. Depuis 2015 jusqu’au 5 février 2024 (jour où le gouvernement wallon a annoncé la suspension de tous les permis d’exportation vers Israël), le Gouvernement wallon a accordé des licences d'exportation de poudre à canon vers Israël pour 32 millions d'euros, principalement à la société Eurenco Clermont. La Belgique est ainsi devenue l'un des principaux fournisseurs mondiaux de poudre à canon à Israël : en 2021, elle représentait à elle seule plus de la moitié de l'exportation mondiale de poudre à canon vers ce pays. Le destinataire, Elbit – ou sa filiale IMI – est le principal producteur de munitions pour l'armée israélienne.4

Du côté flamand, des licences d'une valeur de 10,2 millions d'euros ont été accordées depuis 2018 pour l'exportation de systèmes de conduite de tir et de technologie de traitement d'image, principalement produits par OIP Sensor Systems et Scioteq.

Malgré la suspension officielle des licences d’exportation vers Israël, l'armée belge a continué d'acheter 109,5 tonnes de munitions et un véhicule militaire blindé auprès d'entreprises israéliennes de défense depuis octobre 2023.5

L'augmentation des budgets militaires à 2 voire 3,5 % du PIB amènerait au développement d’un complexe militaro-industriel en Europe, ce qui, vu l’intégration actuelle, conduirait, à l’avenir, à une hausse des exportations et importations vers Israël. À moins que nous ne fassions pression sur nos gouvernements et les entreprises ici. Grâce au mouvement pour la Palestine, des victoires ont déjà été remportées avec des arrêts d’exportation – comme la suspension des permis d’exportation en Belgique mais aussi en Allemagne.7 Mais elle sont toutes provisoires. 

Les exportations d'armes : carburant économique de la machine d’occupation israélienne

C’est l’autre face de la médaille : Israël participe activement à la militarisation de nos sociétés en exportant les armes de son complexe militaro-industriel.

Un secteur qui se porte très bien en Israël. En 2024, l’industrie israélienne de l’armement a enregistré pour la quatrième année consécutive des chiffres record. Les exportations se sont élevées à 12,5 milliards d’euros, soit une augmentation de 13 % par rapport à l’année précédente.10

Plus de 54 % de ces exportations ont été destinées à l’Europe. Génocide ou non, il s’agit d’une forte hausse par rapport à 2023, où cela ne représentait encore qu’environ un tiers.

Beaucoup de pays de l’Otan se sont tournés vers Israël après la guerre en Ukraine, attirés par les armements « battle-proven » (« testés au combat »).

L’Allemagne a ainsi acheté des drones Heron et un système de défense antiaérienne Arrow 3. Ce système faisait partie du plus grand contrat d’exportation jamais conclu par Israël (d’une valeur de 3,6 milliards d’euros) et a été signé avec l’Allemagne le 23 novembre 2023, trois semaines après l’invasion de la bande de Gaza. Grâce à de tels accords, l’Allemagne est de loin le meilleur client d’Israël.10

Le Royaume-Uni, la France, l’Italie, la Pologne et d’autres ont acheté des systèmes de drones, d'électronique et de missiles. Pour les États-Unis, les entreprises israéliennes fournissent des composants clés (optiques, électronique, logiciels) pour des systèmes américains comme le F-35. L’armée américaine a aussi acheté des systèmes Iron Dome.8

En Israël, une bonne partie de l’économie se construit à partir de l’industrie militaire, qui représente environ 7,5 % à 8 % de l’ensemble des exportations israéliennes.8 

Cette industrie se concentre sur des créneaux à haute valeur ajoutée où l'expérience opérationnelle israélienne confère un avantage compétitif décisif. Les systèmes de missiles et de défense aérienne génèrent 40 à 50 % des ventes, avec des produits phares comme l'Iron Dome, Arrow et David's Sling, souvent co-développés avec les États-Unis.8 Les drones représentent 15 à 20 % des ventes, positionnant Israël comme leader mondial historique avec des modèles comme le Heron TP et le Hermes 900, utilisés par une quinzaine de pays.7

L’autre secteur en plein essor est celui des systèmes électroniques, de guerre électronique et de renseignement, qui génère 20 à 25 % des revenus.7 Ces technologies de surveillance, cyberdéfense et commandement-contrôle utilisent la pratique et l’expérience de l’armée d’occupation israélienne en matière de renseignement et de guerre asymétrique.

Cette double dépendance montre bien qu’arrêter l’intégration occidentale avec la machine génocidaire est essentielle. Sans les importations occidentales, particulièrement américaines, la machine militaire israélienne perdrait rapidement sa capacité opérationnelle. Les pièces détachées, munitions et composants constituent le sang vital d'un système d'armes intégré qui ne peut fonctionner de manière autonome. Simultanément, sans les exportations d'armes générant plus de 12 milliards de dollars annuels, Israël ne pourrait financer le développement technologique et la production nécessaires au maintien de son avantage militaire. L’argent des contribuables européens alimente directement le régime militaire et constitue donc un carburant pour le génocide et les crimes contre l’humanité. C’est la conclusion de Maha Abdallah, chercheuse palestinienne en doctorat de droit international à l’Université d’Anvers.10

Donc l'arrêt des flux d'importation paralyserait rapidement les opérations militaires, tandis que l'isolement commercial tarirait progressivement les capacités de modernisation.

La raison principale qui explique que les puissances occidentales restent liées à Israël est qu’outre l’intégration militaire, Israël sert directement les intérêts de la politique impérialiste dans le contrôle du Moyen Orient, de ses populations et de ses ressources.9

Références

  1. Capital.fr, "États-Unis, Allemagne, France : quel est le plus gros exportateur d'armes vers Israël ?", 2024. URL : https://www.capital.fr/economie-politique/etats-unis-allemagne-france-quel-est-le-plus-gros-exportateur-darmes-vers-israel-1503545
  2. Andrew Feinstein (expert du commerce mondial des armes), post sur X/Twitter, 22 août 2024. URL : https://x.com/andrewfeinstein/status/1826776068239265838
  3. Junge Welt, "Quatre millions d'euros en cinq semaines : le gouvernement approuve de nouvelles exportations d'armement vers Israël", 20 juin 2025. URL : https://www.jungewelt.de/loginFailed.php?ref=/artikel/502323.waffenexport-nach-israel-merz-l%C3%A4sst-liefern.html
  4. CNCD-11.11.11, "Politique belge en matière de transferts d'armes vers Israël", 17 avril 2024. URL : https://www.cncd.be/Politique-belge-en-matiere-de
  5. VRT NWS, "Depuis le conflit à Gaza, l'armée belge a encore acheté 100 tonnes de munitions à une société israélienne de défense", 10 février 2025. URL : https://www.vrt.be/vrtnws/fr/2025/02/10/depuis-le-conflit-a-gaza-larmee-belge-a-encore-achete-100-tonne/
  6. Tribune Magazine, "Starmer Is Still Arming Genocide" par Anna Stavrianakis, Ruth Rohde et Andrew Feinstein, septembre 2024. URL : https://tribunemag.co.uk/2024/09/starmer-is-still-arming-genocide
  7. https://www.vrt.be/vrtnws/nl/2025/08/08/gaza-bezetting-duitsland-en-internationale-reacties/
  8. Données compilées à partir des estimations 2022-2023 sur l'industrie de défense israélienne (sources : rapports sectoriels et analyses économiques).
  9. Israël, 51e État des États-Unis ?, Wim De Ceukelaere, Lava, 16 décembre 2024, https://lavamedia.be/fr/israel-51e-etat-des-etats-unis/
  10. De Standaard, “Europa geeft miljarden uit aan Israëlische defensie om zich te wapenen tegen Rusland”, oktober 2025. Beschikbaar via: https://www.standaard.be/buitenland/europa-geeft-miljarden-uit-aan-israelische-defensie-om-zich-te-wapenen-tegen-rusland/96325031.html