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Après Ryanair, c’est au tour des travailleurs d’Aviapartner de décrocher la victoire

À l'issue d'une grève de six jours, les travailleurs d'Aviapartner et leurs syndicats ont gagné leur combat. À l'instar de ceux de Ryanair un peu plus tôt, ils ont montré qu'il était possible de remporter des victoires. L’accord obtenu assurera davantage d'emplois stables, un meilleur matériel et une meilleure sécurité de travail.

Jeudi 1 novembre 2018

Le contenu de l'accord est substantiel. Tous les services en sortent renforcés. Il y aura ainsi 45 travailleurs de plus, 20 intérimaires recevront un CDI et tous les travailleurs une prime unique de 250 euros brut. La direction s’est également engagée à investir dans du nouveau matériel jusqu’à concurrence de 3,2 millions d’euros. Après les grèves à Lidl, Ivago et Ryanair plus tôt cette année, les travailleurs d'Aviapartner ont eux aussi tiré la sonnette d'alarme et ont obtenu un accord important ainsi que plus de respect.

Ce n'est pas plus de concurrence qu'il faut mais moins

« Le politique peut intervenir ici », explique Luk De Wilde, spécialiste du transport aérien pour De Morgen. C'est exact et, hélas, il n'a fait que briller par son absence. Mais la solution que présente ce spécilaiste n'est certainement pas la bonne. Il voudrait introduire un concurrent de plus pour Aviapartner et Swissport sur le tarmac. Cela n'améliorera pas les conditions de travail du personnel – la cause même de la grève –, bien au contraire. Le secteur du transport aérien est déjà très compétitif. À Zaventem, Aviapartner et Swissport essaient de se rafler mutuellement les clients (les compagnies aérienne)s. Ils le font en proposant des prix de plus en plus bas. Et cela se fait en économisant toujours plus fortement sur le personnel et le matériel. Un concurrent de plus ne fera que renforcer ce cercle vicieux.

Avec leur grève, ceux de Aviapartner ont précisément montré clairement qu'ils n'acceptaient plus cette spirale vers le bas. Comme aux Pays-Bas, où les travailleurs de plusieurs entreprises de manutention ont fait grève ensemble durant des semaines pour réclamer une CCT avec les mêmes conditions de salaire et de travail pour toutes les entreprises. Ils ne veulent plus de cette lutte concurrentielle effrénée dont ils sont les victimes.

L'idée d'un statut aéroportuaire gagne du terrain

Un exemple de vraie solution, nous en avons déjà un en Belgique : chez nous, tous les dockers ont un seul et même « statut portuaire », fixé dans la loi Major. De la même façon, tout le personnel de l'aéroport devrait obtenir un « statut aéroportuaire » avec, pour tous, les mêmes conditions de salaire et de travail. Seule une telle approche garantit que la lutte concurrentielle ne se livre pas sur le dos des travailleurs. 

Un statut aéroportuaire permet de renforcer les droits et les conditions de travail de tous les travailleurs de l'aéroport. Comme le droit à un contrat définitif et à temps plein au bout de six mois pour lutter contre l'abus de l’intérim et d’autres contrats bidon. Comme les primes et une classification de fonction correcte. Ou encore comme le droit à des horaires fixes afin de freiner l’hyper-flexibilité répartie sur base annuelle ou des règles concernant le nombre de travailleurs nécessaires pour charger ou décharger un certain type d'avion. 

Un statut aéroportuaire assure également la sécurité de l'emploi. Car, aujourd'hui, chaque fois qu'une compagnie aérienne change de société manutentionnaire, des emplois sont en danger. C'est pourquoi le statut aéroportuaire – comme le statut portuaire – doit être lié à l'exploitant de l'aéroport et non à l'entreprise qui obtient le contrat. Ce n'est que de la sorte qu'un contrôle indépendant sera possible. L'État est pour 25 % actionnaire de l'aéroport et peut donc aussi, de cette façon, assumer sa responsabilité. Bref, un statut aéroportuaire est bon pour la sécurité, bon pour un travail décent et bon pour les services proposés aux voyageurs.

Le droit de grève, outil indispensable de résistance contre le dumping social

Laurent Levaux, le président du conseil d'administration d'Aviapartner, veut faire interdire les grèves spontanées à l'aéroport. C'est ce qu'il a déclaré dans la presse le jour même où l'accord était conclu. C'est de la pure provocation. C'est précisément grâce au droit de grève que les travailleurs ont pu donner le signal que « la coupe était pleine », après avoir donné auparavant de multiples autres signaux. Et après que bon nombre de promesses de la direction n’aient jamais abouti. Entre autres, celles faites après une précédente grève en janvier. Sans le droit de grève, il n'y aurait toujours pas aujourd'hui de solution à la situation invivable des milliers de travailleurs de l'aéroport. Sans droit de grève, il n’y a tout simplement pas de justice ni de progrès social.

Mais c'est peut-être précisément ce que veulent les employeurs. Si le droit de grève est limité et que les travailleurs ne peuvent plus se défendre, les employeurs ont la voie libre pour imposer des conditions de salaire et de travail de plus en plus mauvaises et de fouler aux pieds toutes les règlementations sociales, le tout sous le prétexte de la concurrence. C'est cette logique qui, voici 100 ans, était également utilisée pour faire travailler les enfants dans les mines. Les droits et acquis sociaux n'ont été obtenus que parce que travailleurs et syndicats se sont opposés à la logique des Levaux de l'époque.

Jamais autant d'unité et de solidarité

« Je travaille ici depuis dix ans, mais je n'ai jamais vu une telle détermination, ni autant de solidarité entre les sections, entre ouvriers et employés, entre les syndicats et même du côté des voyageurs », explique un travailleur de la section cargo. Les travailleurs d'Aviapartner viennent de Flandre, de Bruxelles et de Wallonie, et de contextes très divers, mais leur unité était très grande. Lors des négociations, les syndicats ont dit dès le début qu'il n'y aurait un accord que si c'était un accord pour tous. Car, trop souvent, la direction applique une stratégie du « diviser pour régner ». Elle fait quelques concessions à une section ou à un groupe de travailleurs afin de rompre l'unité et briser la grève. De plus, dans la grève d'Aviapartner, il n'y a pas eu de solidarité que dans l'entreprise même, mais également de la part d'autres entreprises de l'aéroport et même de l'extérieur. Il y a eu des messages de solidarité venus de Wallonie et du port d'Anvers. Mardi, cette solidarité a connu un point culminant avec l'action menée par 400 personnes dans le hall des départs. Les porte-parole des syndicats ont promis de « soutenir les travailleurs jusqu'à la victoire ».

Une victoire qui inspire

Nous retenons cinq points forts de ce combat victorieux.

1. Il faut oser. Les travailleurs ont osé dire « c'en est assez ! » comme à Lidl, Ivago et Ryanair. Ils se rendent compte que les actionnaires s'enrichissent sur le dos des travailleurs. Ils osent dire « non » à la soif de profit des actionnaires.

2. Sans droit de grève, pas de progrès social. Le droit de grève permet aux travailleurs de poser leurs revendications et d'obtenir un bon accord. Le patronat et le gouvernement veulent limiter le droit de grève afin de s'en prendre à la force de frappe des travailleurs. Nous devons le défendre.

3. Unis, nous sommes plus forts. On peut briser un doigt, pas un poing. Du fait que les travailleurs ont constitué un front unitaire entre toutes les sections, tous les syndicats, tous les travailleurs quelles que soient leur langue et leur origine, la direction n'est pas parvenue à appliquer sa stratégie du « diviser pour régner » et à briser la grève. Au contraire, c'est le front qui a fait plier la direction. 

4. Il faut développer la solidarité. Durant la grève, la solidarité s'est développée bien en dehors de l'aéroport avec, comme point culminant, l'action de mardi dans le hall des départs. Des collègues d'autres firmes de l'aéroport, des chauffeurs de taxi, des syndicalistes de tous les coins du pays et de tous les secteurs sont venus gonfler le moral des travailleurs et syndicats d'Aviapartner. C'était un signal puissant. 

5. Le soutien de l'opinion publique a poussé la direction à céder. Des exemples concrets de l'énorme pression du travail à Aviapartner et les images des outils de travail en mauvais état ont ouvert les yeux des gens. Dans les médias, les premiers commentaires sur les frustrations des voyageurs ont bien vite fait place à une compréhension envers le cri d'alarme des grévistes. L'employeur et les faiseurs d'opinion hostiles aux syndicats ne sont pas parvenus à faire passer leur idée de service minimum. Le soutien de l'opinion publique et de nombreux voyageurs a poussé la direction dos au mur.