Le PTB plus proche de toi et toi plus proche du PTB. Renforce la vague sociale.!

Télécharge notre app

12 jours de guerre en marge d’un génocide : que se cache-t-il derrière l’agression de l’Iran par les États-Unis et Israël ?

En juin, Israël a bombardé l’Iran, qui s’est défendu avec acharnement. Finalement, la guerre a pris fin après une intervention des États-Unis lancée pour que le président américain Trump puisse se rendre au sommet de l’Otan à La Haye avec l’aura d’un artisan de la paix. Mais que s’est-il passé exactement et pourquoi l’Iran était-il la cible ?

Mercredi 2 juillet 2025

Drapeau de l'Iran sur une carte de la région.

Une attaque surprise pour renverser un régime

Le 13 juin, Israël a frappé de manière inattendue. 200 avions ont bombardé l’Iran sans être inquiétés car la défense antiaérienne avait été neutralisée. Des attaques ont été menées sur au moins 15 sites dans ce vaste pays. Des cibles militaires ont été touchées, mais les installations nucléaires ont également été endommagées.

Israël a également assassiné des individus dans des attaques ciblées, dont une vingtaine de commandants militaires, y compris le chef d’état-major des forces armées et le commandant des Gardiens de la Révolution, ainsi qu’au moins neuf scientifiques. Apparemment, le fameux service secret israélien était bien infiltré en Iran.

Pour l’Iran, l’attaque a été une surprise. Il y avait en effet un accord pour une nouvelle ronde de négociations avec les États-Unis concernant le programme nucléaire iranien controversé. Pourtant, le président américain Trump n’a pas caché qu’il était bien informé de l’attaque. L’Iran avait donc toutes les raisons de se sentir trahi.

Le Premier ministre israélien Netanyahou n’a d’ailleurs pas caché que le programme d’armes nucléaires n’était qu’un prétexte. Son objectif était un « changement de régime ». Il a ouvertement appelé les Iraniens à renverser leur gouvernement. Peu après le début des attaques, les services secrets israéliens ont même téléphoné à des dizaines de hauts dirigeants militaires iraniens, leur ordonnant d’enregistrer des vidéos dans lesquelles ils se rendaient. Dans ces appels téléphoniques, Israël a menacé de tuer leurs femmes et leurs enfants. Des pratiques de gangsters. Mais le plan a échoué car aucune de ces cibles n’a cédé aux menaces. La révolte iranienne n’a pas eu lieu.

Douze jours de guerre

Ce qui a suivi a été une guerre de douze jours où les deux pays se sont bombardés mutuellement. L’Iran a également été attaqué par des avions car Israël avait désactivé presque toute la défense antiaérienne. La plupart des victimes ont donc été du côté iranien, souvent des civils innocents. Cependant, l’Iran a réussi à percer le bouclier antimissile israélien à plusieurs reprises, et une trentaine de victimes sont également tombées de ce côté. Pourtant, Israël possède le système de défense antimissile le plus avancé du monde.

L’attaque israélienne était sans aucun doute une violation du droit international. « Tout juriste international sérieux est d’accord là-dessus », a déclaré Dimitri Van den Meersche, un expert belge en droit international. « Il y a une interdiction claire de l’usage de la force contre l’intégrité territoriale d’un État. C’est le cœur de la Charte des Nations Unies. » Selon le professeur, l’attaque était donc tout aussi illégale que l’invasion russe de l’Ukraine.

Pourtant, la réaction des dirigeants politiques européens a été totalement différente. Aucun d’entre eux n’a pu prononcer une condamnation et certains ont même parlé – à tort – du droit d’Israël à se défendre. Cela contrastait avec la réaction des pays du Sud, où l’on continue de respecter le droit international. Le monde arabe et les pays musulmans, mais aussi la Chine, ont fermement condamné l’agression israélienne.

Finalement, les États-Unis se sont directement mêlés aux combats. Dans la nuit du 21 au 22 juin, ils ont bombardé trois sites nucléaires iraniens à Fordow, Natanz et Isfahan. Des bombardiers B-2 avec des « bunker busters » ont été utilisés, des bombes spéciales capables de pénétrer jusqu’à 60 mètres sous terre. Selon les États-Unis et l’Iran, il y a des dégâts aux installations nucléaires, mais l’étendue n’est pas connue avec certitude.

La réponse de l’Iran n’a pas tardé. Le lundi 23 juin, il a tiré des missiles sur une base américaine au Qatar. Cependant, cette attaque avait été annoncée à l’avance, de sorte que les États-Unis ont pu intercepter tous les missiles. Quelques heures plus tard, Trump a annoncé un cessez-le-feu. Il avait forcé Israël à accepter un accord, après la « représailles » de l’Iran qui était donc plutôt pour le spectacle.

Ce qui a suivi a montré une fois de plus qu’Israël est en fait simplement une extension de la politique étrangère américaine. Israël a affirmé quelques heures plus tard que l’Iran avait violé l’accord et a annoncé des représailles. Trump a alors ordonné publiquement à Israël sur sa plateforme de réseau social : « Ne larguez pas ces bombes car ce serait une violation importante. Ramenez les pilotes à la maison maintenant. » Il a également dit aux journalistes qu’il était très en colère, et surtout contre Israël. Résultat ? Finalement, les bombardiers israéliens sont effectivement rentrés sagement. Le cessez-le-feu (temporairement) sauvé.

Le programme nucléaire

Chaque fois qu’Israël frappe en Iran, c’est soi-disant parce que l’Iran travaille sur des armes nucléaires. Le Premier ministre israélien Netanyahou affirme depuis 1992 que le pays « est sur le point de développer une bombe atomique ». En réalité, l’Iran a abandonné cette ambition en 2003. Depuis lors, le pays soumet ses activités nucléaires aux contrôles de l’Agence Internationale de l’Énergie Atomique (AIEA).

Malgré cela, les accusations n’ont pas cessé. Israël et les États-Unis ont continué d’affirmer que l’Iran avait un programme secret d’armes nucléaires. L’Iran a souffert de sanctions commerciales. Finalement, un accord a été conclu en 2015, prévoyant des contrôles supplémentaires par l’AIEA et une réduction partielle du programme atomique en échange d’un allégement des sanctions.

En 2018, Trump, pendant son premier mandat, a cependant décidé de rompre unilatéralement cet accord. Début 2020, il a même ordonné l’assassinat du général iranien Soleimani. Depuis lors, l’Iran a déclaré qu’il ne respectait plus non plus l’accord. Bref, si Netanyahou peut toujours affirmer que l’Iran ne respecte pas les règles concernant l’utilisation de l’énergie nucléaire, c’est en fait grâce à une décision de Trump pendant son premier mandat.

Les services de renseignement américains et l’AIEA ont tous deux déclaré qu’il n’y avait aucune preuve que l’Iran travaillait sur une bombe atomique. Tout comme en Irak en 2003, les États-Unis, et leur allié Israël, ont utilisé le prétexte de soi-disant « armes de destruction massive » pour une intervention militaire qui va totalement à l’encontre du droit international.

L’ironie de tout cela est bien sûr qu’il n’y a qu’un seul pays dans toute la région du Moyen-Orient qui possède des armes nucléaires, et c’est Israël. De plus, Israël le fait sans permettre aucun contrôle international. Le pays n’a pas non plus signé de traités internationaux qui imposent des restrictions comme d’autres puissances nucléaires, sans que cela n’ait entraîné aucune protestation de l’Europe ou des États-Unis. Israël veut simplement rester la seule puissance nucléaire régionale et ne pense pas devoir respecter les règles internationales.

Quelles sont les véritables raisons de la guerre ?

Si le soi-disant programme atomique iranien n’était qu’un prétexte, pourquoi Israël et les États-Unis sont-ils alors partis en guerre ? Une raison était sans aucun doute que la guerre convenait bien au gouvernement de Netanyahou pour détourner l’attention. Le Premier ministre est sous pression en Israël en raison des procès pour corruption contre lui et du fait que son gouvernement d’extrême droite rencontre une résistance chez les Israéliens moins radicaux. Le pays est déjà impliqué depuis près de deux ans dans un génocide impitoyable à Gaza et de nombreux Israéliens, surtout les familles des personnes détenues à Gaza, critiquent fortement son approche. Par la guerre avec l’Iran, Netanyahou a pu réunir le pays derrière lui – au moins temporairement.

Cependant, il existe des raisons encore plus profondes. Israël n’est en effet pas un pays ordinaire, mais plutôt un avant-poste des États-Unis et de l’Europe au Moyen-Orient. C’est grâce à Israël que les États-Unis parviennent à dominer toute la région depuis des décennies. L’Iran, cependant, joue un rôle important dans la résistance à la domination israélo-américaine.

L’Iran fut aussi autrefois un allié américain. En 1953, les États-Unis ont orchestré un coup d’État contre le gouvernement démocratiquement élu du Premier ministre iranien Mossadegh parce qu’il voulait une voie indépendante pour son pays et en particulier l’utilisation de la richesse pétrolière pour le développement du pays lui-même et non pour le profit des multinationales. À la place, ils ont installé le régime autoritaire du Shah. L’actuelle République islamique d’Iran est issue d’une révolte, en 1979, contre la dictature du Shah. Depuis lors, le pays s’oppose à la domination de la région par les États-Unis et Israël et peut compter pour cela sur des alliés au Liban, en Irak et au Yémen.

Jusqu’à récemment, le régime en Syrie était également un allié. Il a cependant été renversé fin de l’année dernière par des rebelles soutenus par la Turquie, Israël et les États-Unis. Les rebelles Houthis au Yémen et surtout le Hezbollah au Liban ont déjà subi le feu nourri des forces armées israéliennes et sont affaiblis. L’Iran lui-même est resté une épine dans le pied de l’impérialisme.

Il y avait aussi une troisième raison de prendre l’Iran pour cible. Les États-Unis préparent la confrontation avec la Chine, le pays qu’ils considèrent comme leur rival stratégique. Dans cette lutte, il était important d’affaiblir l’Iran pour deux raisons. Premièrement, le fait que l’Iran ait choisi de rejoindre l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) et les BRICS, deux alliances de pays, dont la Chine, qui optent pour la coopération mutuelle et l’indépendance vis-à-vis de l’hégémonie des États-Unis.

Mais l’Iran est aussi d’une importance économique dans la lutte de pouvoir que les États-Unis mènent contre les éventuels concurrents émergents. Il collabore également avec la Chine dans le projet de la Nouvelle Route de la Soie, qui prévoit des infrastructures pour le transport de matières premières et les routes commerciales. Le pays forme en effet un pont terrestre stratégique entre différents continents qui est essentiel pour les ports en eau profonde et les réseaux ferroviaires qui relient la Chine à l’Asie centrale, à l’Europe et au Moyen-Orient. Il va de soi que les États-Unis préfèrent ne pas voir cette coopération se réaliser.

Et puis il y a le pétrole. 20 % de la consommation mondiale de pétrole passe par le détroit d’Ormuz, un détroit étroit au large des côtes iraniennes. La grande majorité de ce pétrole, 80 %, est ensuite acheminée vers l’Asie. Toute perturbation de la navigation dans ce détroit par la guerre peut donc avoir un impact majeur sur des pays comme le Japon, la Corée du Sud et la Chine. Trump ne manque pas d’exploiter cette vulnérabilité dans sa rivalité avec ce pays.

Pas de paix

Les tirs mutuels entre l’Iran et Israël ont beau avoir cessé, la paix est loin d’être établie. N’oublions pas que le génocide à Gaza s’est poursuivi sans relâche pendant toute cette période et qu’Israël a entre-temps tué des centaines de Palestiniens. Israël a également continué d’étendre son occupation en Cisjordanie.

L’expérience montre également qu’Israël ne prend pas au sérieux les accords de cessez-le-feu. Ainsi, il existe un accord de paix avec le Liban depuis novembre, mais Israël continue de bombarder régulièrement le territoire libanais. Les États-Unis ne sont pas non plus dignes de confiance. Trump a également déjà déclaré qu’il bombarderait à nouveau l’Iran si le pays – selon lui – développait à nouveau une bombe atomique.

Le monde n’est donc certainement pas devenu plus sûr. Au contraire, l’Iran risque maintenant de conclure qu’il vaut mieux travailler secrètement à une bombe nucléaire que de se plier aux accords internationaux et d’autoriser le contrôle des agences internationales. Pourtant, un Moyen-Orient exempt d’armes nucléaires serait une meilleure option, et Israël devrait faire le premier pas dans cette direction.

Israël peut certes affirmer qu’il a fortement affaibli les capacités militaires de l’Iran, mais il ne sort pas pour autant grand vainqueur de cette guerre. Il a également montré un moment rare de vulnérabilité car le célèbre bouclier antimissile « Dôme de Fer » a montré pas mal de failles.

Trump a pu se présenter comme un « artisan de la paix », mais avec cette guerre, les États-Unis voulaient aussi envoyer un message à leur concurrent stratégique et ennemi, la Chine. Trump l’a d’ailleurs fait littéralement lorsqu’il a posté un message sur ses médias sociaux après la fin de la guerre : « La Chine peut maintenant continuer à acheter du pétrole à l’Iran, mais j’espère qu’elle en achètera aussi beaucoup aux États-Unis. » Il voulait ainsi indiquer qu’il a le pouvoir de décider de l’approvisionnement pétrolier chinois. En réalité, l’agression contre l’Iran témoigne également de la nervosité des États-Unis face à la soif croissante d’indépendance dans le Sud global.

L’Iran, de son côté, peut aussi se vanter. Il a tenu bon pendant douze jours face à l’alliance des États-Unis et d’Israël et il a osé attaquer une base américaine. Ainsi, il peut certainement marquer des points dans son propre pays et dans le monde arabe. Objectivement, il est bien sûr affaibli puisque la défense antiaérienne est neutralisée, la haute direction de l’armée est décimée et le programme nucléaire a été endommagé.

Et l’Europe ? Les dirigeants européens ne sont pas seulement tous de facto complices du génocide en Palestine en refusant de prendre des mesures contre leur allié Israël. Ils ont également pris le parti des États-Unis et d’Israël dans ce conflit, au mépris du droit international.

Cette guerre montre clairement l’agressivité croissante de l’impérialisme américain et la spirale dangereuse dans laquelle cela nous entraîne. Après la Seconde Guerre mondiale, des règles ont été prises et les pays doivent les respecter en cas de litiges. Ces règles sont de plus en plus sous pression. En 2003, par exemple, les États-Unis ont lancé une attaque illégale contre l’Irak sous prétexte que le pays développerait des armes de destruction massive. À l’époque, les États-Unis ont plaidé pour un mandat pour leur invasion devant le Conseil de sécurité des Nations Unies. Et plusieurs pays européens ont pris position contre la guerre. Maintenant, les États-Unis et Israël sont partis en guerre sans se soucier des Nations Unies et aucun pays européen n’a protesté. La combinaison d’un impérialisme américain acculé et de la dégradation continue des accords internationaux dans le monde ne fait que mettre davantage en danger notre sécurité.