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Que va faire la Vivaldi avec les contrats en milliards pour les F35 ?

Pour la première fois dans l'histoire, nous avons une femme au poste de ministre de la Défense : Ludivine Dedonder (PS). C’est le seul aspect novateur en matière de politique militaire. En effet, le reste du volet défense de l'accord de gouvernement ne montre pas de grande rupture avec le passé.

Vendredi 16 octobre 2020

Le contrat F-35

L'accord de gouvernement prévoit davantage de contrôle parlementaire et d’implication de la Cour des comptes dans les futurs achats de l'armée. Un pas dans la bonne direction. Mais notre nouveau gouvernement se garde bien de se positionner sur le dossier des F-35. Comme si on ne revenait pas sur les décisions passées. C’est d’autant plus interpelant que, depuis les bancs de l’opposition, les verts et les socialistes avaient eux-mêmes, à plusieurs reprises, pris position pour au moins revoir ces contrats.

Les premiers F-35 n’arriveront que dans quelques années. C'est à l’actuel gouvernement (ainsi qu’au suivant) qu’il reviendra de mettre la main au portefeuille pour le montant ahurissant d'au moins 15 milliards d'euros. De l'argent qu'il qui serait bien plus utile – surtout à l’heure actuelle – dans les soins de santé et à la sécurité sociale.

Les circonstances exceptionnelles comme la forte récession économique causée par la crise du coronavirus justifieraient des mesures exceptionnelles. Qui plus est, il n'y a pas eu de débat démocratique au sujet du contrat et des possibles suppléments. Par ailleurs, plusieurs experts ont montré que le modèle d’avion choisi présentait de nombreux manques et défaillances : par exemple, des fissures peuvent apparaître dans le fuselage de l’appareil.

Maintenant que l'accord de gouvernement appelle à plus de transparence dans les marchés publics de la défense, nous allons intensifier la pression depuis l'opposition. Le précédent gouvernement a systématiquement refusé d 'autoriser un droit de regard public sur le contrat d'achat des F-35 et autres documents importants liés. Jusqu'à présent, nous avons été maintenus dans l'ignorance. Comment mener un débat honnête et transparent sur un contrat à plusieurs milliards de dollars, alors que nous ne savons rien du montant des indemnités en cas de rupture de contrat ?

Investissements supplémentaires dans la défense

Les investissements militaires prévus – par le précédent gouvernement – resteront inchangés. Et il est même probable qu’ils soient revus à la hausse. C'est d’autant plus frappant que les socialistes ont toujours plaidé pour une réduction des dépenses militaires et, a fortiori, des dépenses militaires qui imposent des obligations budgétaires aux gouvernements suivants.

De quoi s’agit-il au juste ? Le gouvernement précédent a acheté pas moins de 442 véhicules blindés (1,5 milliard d'euros), 6 chasseurs de mines (1 milliard d'euros) et des drones (226 millions d’euros). Les factures de ces achats seront pour le(s) prochain(s) gouvernement(s). Plusieurs autres commandes sont encore en cours, qui portent notamment sur l’achat de frégates. En conséquence, pour pouvoir faire face à ces dépenses au cours des prochaines années, le budget de la défense devra être progressivement relevé : une augmentation de 0,93 % du PIB aujourd’hui à 1,3 % en 2030.

Dans l'accord de gouvernement , il est aussi question d’investir davantage dans le personnel militaire. De cette manière, le gouvernement cherche à mettre un terme à la réduction progressive des effectifs militaires. Les syndicats militaires se plaignent déjà depuis longtemps des piètres conditions de travail des militaires, mais les investissements ne seront certainement pas limités au personnel.

Pour reprendre le texte officiel : « Des dépenses supplémentaires pour les infrastructures pourront être inclues dans le plan d’investissement interfédéral. » En d’autres mots : des postes budgétaires supplémentaires en dehors du budget de la Défense sont prévus pour les investissements dans les infrastructures de défense.

Nous avons déjà eu un avant-goût en septembre. Le gouvernement Wilmès avait alors annoncé que 300 millions d'euros devaient être investis dans des travaux d'infrastructure des aéroports de Florennes et de Kleine Brogel, afin de mettre ceux-ci à niveau en vue de l'arrivée des fameux F-35 et des drones. Il n'a pas été précisé si ce montant était inclus ou non dans le dossier F-35.

L’accord de gouvernement comporte un autre passage ambigu. Le gouvernement entend examiner comment, d’ici 2030, il peut tracer une trajectoire de croissance afin de réaligner notre effort de défense sur celui des alliés européens de l’Otan. Quand on sait que l'Otan – avec à sa tête les États-Unis – fait pression pour que 2 % du PIB soit consacré à la défense, cela n'augure rien de bon.

Dans le cadre de l’Otan

L'accord de gouvernement dit que la Belgique jouera un rôle proactif dans le désarmement nucléaire, mais reste muet sur les ogives nucléaires de Kleine Brogel et leur renouvellement prévu. C’est pourtant le député Groen Wouter De Vriendt qui a plaidé à plusieurs reprises en faveur du retrait des armes nucléaires du territoire belge. « Voulons-nous vraiment que, d'une simple pression sur un bouton, Donald Trump puisse déployer des armes nucléaires à partir de notre territoire ? », avait déclaré De Vriendt.

Aujourd’hui, le moment est particulièrement opportun, car le renouvellement des armes nucléaires est prévu à partir de cette année. C'est donc à ce gouvernement qu'il revient de décider si les nouvelles ogives sont les bienvenues ou non. Le déploiement d’armes nucléaires nord-américaines est un choix politique, et non une obligation ou une fatalité pour notre pays – pas même au sein de l’Otan. De fait, d'autres pays membres de l'Otan ont déjà précédé la Belgique en décidant de ne plus conserver d'armes nucléaires nord-américaines sur leur territoire.

Le gouvernement veut plaider pour le désarmement nucléaire dans les forums mondiaux. Selon les experts, la Belgique envoie un signal positif en indiquant dans l'accord de gouvernement qu’elle examinera son engagement envers le traité des Nations unies sur l’interdiction des armes nucléaires. Mais comment la Belgique peut-elle être crédible sur ce plan, alors qu'en même temps elle déclare ne pas vouloir porter atteinte à ses engagements et obligations au sein de l'Otan ? L'Otan déclare en effet clairement que la doctrine nucléaire – en d’autres termes, la nécessité des armes nucléaires – constitue une base essentielle de sa politique de sécurité.

La capacité d’intervention militaire reste une priorité

« Nos partenaires européens et transatlantiques attendent de notre pays une capacité opérationnelle », poursuit l'accord de gouvernement. Cela signifie que la Belgique continuera à participer aux interventions militaires à l'étranger. La Belgique préconise une défense européenne efficace, mais l’Otan reste également une pierre angulaire de notre sécurité stratégique. Bref, rien de nouveau.

Le 1er octobre, une mission belge composée de plusieurs avions de chasse F-16 a été lancée dans le cadre de l'opération militaire nord-américaine « Inherent Resolve » au-dessus de l'Irak et de la Syrie. Le gouvernement en affaires courantes avait donné son feu vert à cette mission. Il lui a fallu pour cela le soutien du Vlaams Belang, étant donné que les partis sp.a/PS et Groen/Ecolo, alors dans l'opposition, se sont abstenus lors du vote, faute d'un mandat ancré dans le droit international. L'accord de gouvernement stipule que les missions ne peuvent se poursuivre que dans ces conditions.

Bien qu'il s'agisse là aussi d'un pas en avant, c’est aussi une occasion manquée pour ce gouvernement de se prononcer sur la mission en cours. La coalition gouvernementale s'est toutefois sérieusement engagée à faire preuve d’une plus grande transparence sur le nombre de victimes civiles. En d'autres termes : les bombardements sur la Syrie et l'Irak vont se poursuivre, mais pour la première fois, le Parlement aura accès au nombre des victimes civiles et aux causes de celles-ci. Dans quel but ? L'accord de coalition indique explicitement que ce gouvernement examinera la possibilité d’indemniser les victimes civiles. Ce qui est plutôt cynique.

Pas de rupture avec le passé

Le volet « défense » de l'accord de gouvernement s'inscrit dans la lignée du gouvernement précédent. Le contrat F-35 n'est pas revu et les dépenses militaires vont augmenter. L’Otan reste la pierre angulaire de la stratégie de sécurité de la Belgique. On opte pour une défense plus européenne, mais toujours dans le cadre d'une bonne relation UE-États-Unis. Malgré toutes les belles et légitimes mesures prônant la transparence et un contrôle plus démocratique, l'armement nucléaire et les interventions militaires restent la réalité pour les années à venir.