L'industrie comme atout pour le climat

L’industrie est un levier pour la révolution climatique sociale. Bien qu’elle reste la principale source de gaz à effet de serre, elle peut jouer un rôle central dans le chauffage durable de nos villes, le recyclage de matériaux et l’économie d’énergie. C’est bon pour la planète et cela contribue à la création d’emplois durables. Avec des normes contraignantes et une recherche ancrée dans le domaine public, nous donnons un coup de balai à la logique du profit. Nous mettons l’industrie sur la voie d’un avenir durable.

L’industrie est l’une des principales sources de gaz à effet de serre dans notre pays. Avec la construction, elle représente 28 % des émissions totales, sans tenir compte de l’énergie qu’elle puise du réseau. Les entreprises sont en effet aussi les plus grandes consommatrices d’énergie. Pourtant, les décideurs politiques belges n’y prêtent guère attention. Ils continuent de s’appuyer sur le système européen d’échange de quotas d’émission pour les plus gros pollueurs.

Il n’est donc pas surprenant que cette politique produise très peu de résultats. Pour les entreprises privées, c’est le profit à court terme qui prime, et non la viabilité de la planète pour les générations futures. Les années de crise ont vu une diminution des émissions de l’industrie belge, mais depuis 2012, les chiffres sont de nouveau à la hausse. En 2016, dernière année pour laquelle des chiffres sont disponibles, les émissions de gaz à effet de serre ont atteint leur plus haut niveau en cinq ans. Alors que les effets du changement climatique deviennent de plus en plus visibles, les grandes entreprises vont résolument dans la mauvaise direction.

Nous voulons que d’ici 2050, l’industrie cesse d’émettre des gaz à effet de serre et qu’à la place, elle les capte. Cela nécessitera une véritable révolution, qui ne viendra pas spontanément des grandes entreprises elles-mêmes. Il est plus que temps de donner un sérieux coup de barre pour vaincre la logique du profit et de la concurrence qui paralyse tout changement de cap. C’est pourquoi nous proposons de remplacer l’échange de droits d’émission par des normes contraignantes, avec une voie claire vers des émissions négatives en 2050. De cette manière, l’industrie sera contrainte de prendre des mesures drastiques d’économie d’énergie.

Nous allons également devoir revoir nos modes de production. L’hydrogène constitue la clef de voûte à la fois d’une production d’énergie renouvelable et d’une révolution de la manière de produire dans l’industrie lourde. Aussi, au lieu de constituer une simple pierre d’achoppement à la révolution verte, cette industrie en représentera l’un des principaux atouts. D’ici 2050, elle sera capable d’absorber le CO2 de l’atmosphère au lieu d’en être le principal émetteur actuellement. Nous garantissons ainsi la viabilité à long terme de l’industrie belge et créons de nouveaux emplois verts. Des emplois qui, loin de constituer un obstacle à un avenir durable, contribuent activement à la viabilité de la planète.

Ce que nous voulons

Un. Une utilisation rationnelle de l’énergie dans l’industrie

  • Nous introduisons des objectifs contraignants pour rendre l’industrie neutre au niveau climatique d’ici 2040. Nous créons ainsi les conditions permettant à l’industrie de se convertir en un capteur plutôt qu’un émetteur de gaz à effet de serre à l’horizon 2050.
  • Grâce aux réseaux de chauffage urbain, nous récupérons la chaleur excédentaire émise par des industries pour répondre à la demande en chaleur d’autres industries et des habitations.
  • De nombreuses techniques d’économie d’énergie sont prêtes à l’emploi, mais ne sont pas mises en application. Nous obligeons l’industrie à investir dans les meilleures techniques d’économie d’énergie.

Les recherches du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) montrent que l’intensité énergétique de l’industrie pourrait immédiatement être réduite d’un quart si elle utilisait les meilleures techniques disponibles. Mais l’investissement en efficacité énergétique ne rapporte pas assez vite selon les normes du marché. C’est pourquoi nous rendons obligatoire l’utilisation de ces techniques, pour mettre un terme au gaspillage d’énergie. D’autres recherches, financées par la banque d’investissement pour le climat, nous aideront à réduire encore davantage notre consommation d’énergie. Ce qui nous permettra de réduire les émissions de gaz à effet de serre dans l’industrie de 80 % à l’horizon 2050.

Les tours de refroidissement expulsent d’énormes quantités de chaleur dans l’air. Quel gaspillage d’énergie ! Or cette chaleur peut parfaitement être réutilisée. Par exemple, par des usines proches qui ont besoin de chaleur de haute qualité et qui, à l’heure actuelle, sont obligées de produire elles-mêmes cette chaleur à partir de combustibles fossiles. Ou par des zones résidentielles situées à proximité : les réseaux de chauffage urbain peuvent ainsi rendre superflues les chaudières à gaz et à mazout.

Deux. Place à la révolution de l’hydrogène

  • Le soleil ne brille pas tout le temps, le vent ne souffle pas toujours suffisamment fort. Pour compenser les creux de production d’énergie renouvelable, nous utilisons les excédents d’énergie provenant des panneaux solaires et des éoliennes pour produire de l’hydrogène. L’avantage : l’hydrogène peut ensuite être stocké et facilement retransformé plus tard en électricité.
  • Avec le soutien de la banque d’investissement pour le climat, nous stimulons le développement d’une pétrochimie circulaire par laquelle le CO2 produit par l’industrie est capté et transformé avec l’aide de l’hydrogène en matières premières nécessaires dans la pétrochimie.
  • En incitant le secteur sidérurgique à investir dans la technologie verte des hauts-fourneaux de nouvelle génération utilisant de l’hydrogène et ne dégageant pas de CO2, seul de l’acier à faible teneur de carbone sera produit en Belgique d’ici 2035, en vue de passer à l’acier zéro carbone d’ici 2040.

Dans le chapitre précédent, on a pu voir comment utiliser l’hydrogène pour compenser les fluctuations de l’énergie renouvelable. L’hydrogène stocké peut faire office de batteries, mais aussi de matière première de base pour l’industrie, se substituant aux processus de production extrêmement polluants en place.

Mais l’hydrogène a encore bien d’autres atouts dans sa manche. En capturant le CO2 libéré par les processus industriels de combustion et en le faisant réagir avec de l’hydrogène, nous pouvons produire du méthane et du méthanol. Le méthane peut remplacer le gaz naturel fossile ; le méthanol peut servir de matière première de base dans l’industrie pétrochimique. Au lieu de produire ces substances à partir de pétrole et de gaz naturel, nous partons tout simplement d’eau et d’énergie renouvelable ! Nous créons ainsi des circuits fermés : une pétrochimie circulaire, où à terme n’intervient plus une goutte de pétrole. Appliquez ceci sur 220 des plus grosses cheminées en Flandre et l’émission belge diminue déjà au moins de 20 % !

La technologie de l’hydrolyse existe depuis plus d’un siècle. L’île de Goeree-Overflakkee aux Pays-Bas est en bonne voie, à l’aide de cette technologie, de devenir neutre pour le climat d’ici 2020 (!). Et à Augsbourg en Allemagne, on produit aujourd’hui déjà du méthane vert à base d’hydrogène et d’énergie renouvelable, qu’on brûle alors en système fermé pour en tirer de l’énergie. Malgré ces bons exemples, les entreprises chez nous ne prennent pas d’initiatives pour développer la technologie à grande échelle. Le risque de tels investissements est trop grand dans le cadre du libre marché et cela ne garantit pas de retour économique certain. C’est pourquoi, avec la banque d’investissement pour le climat, nous avançons les moyens pour mettre en marche la révolution de l’hydrogène. Les entreprises pourront bénéficier de ces nouvelles techniques pour respecter leurs normes d’émission, à condition de payer des redevances à la banque d’investissement pour le climat.

À terme, il sera également possible d’extraire et de capter activement le CO2 de l’atmosphère et de le stabiliser dans des produits durables. Nous choisissons de ne pas nous débarrasser du CO2 dans les couches profondes de la terre. Ce qu’on appelle le Carbon Capture and Storage est une technique risquée et inefficace. Et bien sûr, les investissements dans le captage du CO2 ne peuvent servir de prétexte pour réduire les efforts de lutte contre les émissions de carbone.

L’hydrogène peut également révolutionner le secteur de l’acier. Les fours à coke polluants d’aujourd’hui peuvent être remplacés par la technologie verte des hauts-fourneaux de nouvelle génération utilisant de l’hydrogène et ne dégageant pas de CO2. Avec de nouvelles techniques de captage, dans lesquelles les gaz de haut fourneau sont transformés en biocarburant par des micro-organismes, nous pouvons faire de l’industrie sidérurgique belge le fer de lance mondial des développements de haute technologie dans ce secteur.

Trois. Pour une autre façon de produire

  • Nous optons résolument pour l’économie circulaire, où les matières premières peuvent être utilisées à l’infini. Cela permet non seulement d’économiser des matériaux, mais aussi de l’énergie.
  • Nous luttons contre l’excès d’emballages et de matériaux à usage unique. Nous introduisons également un système de consigne sur les emballages de boissons. D’ici 2050, nous voulons une économie zéro déchets.
  • Nous luttons contre l’obsolescence programmée des appareils électriques en augmentant de manière significative les durées de garantie légale. Et nous réduisons la montagne croissante des déchets électroniques.
  • Nous accélérons la recherche de nouveaux matériaux de construction à base de carbone au lieu de ciment et nous optons pour le bois comme structure portante dans la construction.

La quantité de gaz à effet de serre émise par l’industrie dépend principalement du type de produits qu’elle produit. À l’heure actuelle, beaucoup de produits sont destinés à un usage unique. Les ingénieurs sont chargés de concevoir des appareils qui ont une courte durée de vie et qui doivent être remplacés. La meilleure recette pour générer des bénéfices plantureux à court terme est une véritable catastrophe climatique à plus long terme.

Prenons, par exemple, le cas des sacs en plastique. Chaque année, nous en consommons pas moins de 100 milliards rien qu’en Europe. Ils sont fabriqués à partir d’énergies fossiles comme le pétrole et, après usage, finissent souvent dans la nature, où il leur faut des centaines d’années pour se décomposer. C’est pourquoi les sacs en plastique à usage unique font déjà l’objet d’une interdiction en Scandinavie, aux Pays-Bas et en France, mais aussi en Wallonie et à Bruxelles (pas encore en Flandre). Les produits jetables tels que les sacs, mais aussi les gobelets, les assiettes et les couverts en plastique doivent être remplacés le plus rapidement possible par des produits réutilisables.

À l’heure actuelle, beaucoup d’appareils sont sciemment conçus pour ne pas durer. Car plus les consommateurs se rendent rapidement au magasin pour acheter une nouvelle imprimante, une machine à laver ou un smartphone, plus les caisses enregistreuses tournent. Le résultat ? Un gaspillage invraisemblable de matières premières et d’énergie. La Chambre a voté une résolution pour remédier à cette obsolescence programmée, mais la majorité a fait en sorte que le texte ne puisse pas changer grand-chose dans la pratique. Nous voulons prolonger les périodes de garantie pour mettre un terme à ces pratiques nuisibles. De cette façon, nous réduisons également la montagne croissante de déchets électroniques. D’ici 2050, nous voulons une économie sans déchets pour que les incinérateurs deviennent obsolètes.

À l’heure actuelle, dans le secteur de la construction, nous dépendons fortement du béton. Or sa production émet énormément de gaz à effet de serre. Heureusement, le béton peut dans de nombreux cas être remplacé par le bois. Nous pouvons donc faire appel à une sylviculture durable. Le bois fixe le carbone au lieu de le rejeter. Le bois est en outre solide. Il est même projeté d’ériger pour la première fois des gratte-ciel entièrement en bois. Nous accélérons également le développement de nouveaux matériaux de construction basés sur le recyclage du CO2.

En produisant moins et en choisissant mieux ce que nous fabriquons, nous aurons déjà énormément accompli. Cependant, la manière dont nous produisons a naturellement aussi toute son importance. Actuellement, la production industrielle se déroule, en grande partie, de manière linéaire. Les entreprises utilisent des matières premières limitées pour fabriquer des produits qui sont incinérés comme déchets ou mis en décharge après une durée de vie souvent courte. En produisant de la sorte, nous sommes en train de miner notre planète : nous prenons plus que ce que la terre est à même de renouveler, et nous générons plus de pollution qu’elle n’est capable d’absorber. Nous devons opérer la transition vers une économie circulaire au lieu d’une économie linéaire. Les déchets sont ainsi utilisés comme matière première, encore et encore. Et en concevant des produits de façon modulaire, nous pouvons plus aisément les réparer. Cela permet d’économiser des matières premières, mais aussi énormément d’énergie. Nous soutenons donc aussi le concept des repair cafés (ou cafés de réparation) où les produits sont réparés pour être réutilisés.

Une production circulaire implique que nous rendions la collecte de déchets plus efficace. Un levier en ce sens est le prélèvement d’une consigne sur les emballages de boissons. Or les gouvernements régionaux rechignent à mettre en place ce système de consignes. La mesure ne coûtera toutefois rien à la personne qui rapporte des canettes et des bouteilles en plastique usagées. Elle a également un impact majeur sur la quantité de matériaux et de déchets pouvant être réutilisés.

Quatre. La Belgique sans amiante en 2024

  • Nous voulons d’ici 2020 dresser une cartographie de l’amiante dans les bâtiments publics et privés, les maisons, les décharges et les sols contaminés. Cette base de données centralisée sur l’amiante sera accessible à tous.
  • Les dépôts d’amiante situés à moins de 500 mètres de zones d’habitation seront immédiatement fermés. Nous renforçons les contrôles sur le stockage de l’amiante. Ce stockage doit être sécurisé, de préférence par vitrification.
  • Nous revoyons le financement du Fonds amiante et augmentons la contribution de l’industrie de l’amiante à ce Fonds.
  • D’ici 2024, nous éliminerons tout l’amiante identifié dans les bâtiments publics et privés, avec une priorité accordée aux écoles et grâce à l’intervention financière du Fonds amiante.
  • Nous ratifions la Convention de Lugano sur la responsabilité civile des dommages résultant d’activités dangereuses pour l’environnement et militons activement pour une interdiction totale à l’échelle mondiale de l’extraction et de l’utilisation de l’amiante.

Durant des années, notre pays a été l’un des plus grands consommateurs de plaques d’amiante au monde. On sait déjà depuis des décennies que l’inhalation de fibres d’amiante peut entraîner la mort par cancer. Cependant, sous la pression de la mafia de l’amiante (les sociétés Eternit, SVC et compagnie), il a fallu attendre jusqu’à 1998 avant de voir apparaître une interdiction générale sur l’incorporation de l’amiante dans les matériaux de construction. Des centaines de personnes ont été victimes de l’amiante ou ont perdu des proches des suites d’un cancer de l’amiante. Les personnes qui ont travaillé avec l’amiante ou qui ont vécu à proximité d’une usine de transformation de l’amiante vivent dans la crainte d’être atteintes par le redoutable cancer causé par l’amiante.

L’amiante a été utilisé dans la construction d’innombrables maisons, écuries, abris de jardin et bâtiments scolaires. La plupart des gens ne disposent pas des moyens nécessaires pour le faire enlever par des entreprises professionnelles. Nous voulons que les pouvoirs publics cessent de détourner le regard et s’attellent sans plus tarder à faire de notre pays un pays sans amiante. La Flandre s’est muni d’un plan pour éliminer tout amiante à risque d’ici 2040. Aucune date butoir n’est fixée en Wallonie et à Bruxelles. Alors qu’aux Pays-Bas, l’élimination totale de l’amiante a été avancée à 2024… Nous aussi, nous devons pouvoir le faire ! C’est pourquoi, nous voulons d’ici 2020 recourir à une base de données centralisée sur l’amiante qui permet de dresser un inventaire de l’amiante dans l’ensemble des bâtiments publics et privés.

Pour éviter que l’amiante ne continue à faire des victimes, même après son élimination des bâtiments, nous fermons les décharges d’amiante actives à moins de 500 mètres des habitations. Les risques pour les riverains de respirer de la poussière d’amiante sont en effet trop élevés, comme à la décharge SVK à Saint-Nicolas-Waes (en Flandre-Orientale). Suite à une campagne résolue d’un comité d’action et du PTB, la fermeture définitive de la décharge SVK a été décidée. Il faut privilégier la vitrification des déchets d’amiante (les faire fondre pour les transformer en un résidu vitreux totalement inerte), la seule méthode qui soit vraiment sûre pour la santé d’après les spécialistes.

En 2015 et 2016, les autorités n’ont pas payé leur contribution au Fonds amiante (qui verse des indemnités aux victimes d’un cancer causé par l’exposition à l’amiante), parce que les réserves du Fonds étaient jugées suffisantes. Mais c’est une vision à court terme qui témoigne d’un manque total de compréhension de l’impact de l’amiante sur la santé. Le temps d’incubation de cancers comme le mésothéliome et l’intervalle qui sépare l’exposition des premiers symptômes peuvent s’élever à plus de cinquante ans. Le Sénat français considère d’ailleurs pour cette raison que le nombre de cancers va continuer à augmenter jusqu’en 2025. Nous sommes donc encore loin du pic. En outre, le Fonds amiante pourrait intervenir aussi dans le financement de l’élimination de l’amiante dans les bâtiments. Pour cette raison, nous continuons à soutenir le Fonds amiante et nous exigeons une augmentation de la contribution de l’industrie de l’amiante à ce fonds.

Nous ratifierons la Convention de Lugano sur la responsabilité civile des dommages résultant d’activités dangereuses pour l’environnement. Nous allons enfin militer activement pour une interdiction totale à l’échelle mondiale de l’extraction et de l’utilisation de l’amiante.