Combattre les dépendances et s'attaquer à la criminalité liée à la drogue
La guerre contre la drogue est un échec tant sur le plan de la santé publique que de la sécurité. Il est temps de réorienter la politique en matière de drogues et d'addictions et d'adopter une approche plus efficace et plus humaine pour les combattre. Pour nous, cette politique doit être centrée sur la prévention et l'aide. Nous revalorisons les services douaniers et fédéraux nécessaires pour lutter contre le trafic international de stupéfiants. Nous mettons fin à l'hypocrisie autour du cannabis et sortons cette drogue de l'illégalité.
Lundi 9 janvier 2023, Firdaous, une enfant de Merksem, est tuée. Elle avait 11 ans. Elle a été abattue par des criminels de la drogue qui ont tiré sur la porte du garage de la maison de ses parents. Firdaous est la première victime civile de la guerre des gangs qui sévit à Anvers dans le milieu de la drogue depuis plusieurs années. Une telle violence s'étend également à d'autres villes telles que Gand, Bruxelles et Malines. Les citoyens ne se sentent plus en sécurité dans leur propre quartier et exigent, à juste titre, que ces attaques cessent. Nous prenons très au sérieux la lutte contre le crime organisé.
Outre le problème de la sécurité, la dépendance entraîne chez la personne qui a une consommation problématique, ainsi que chez ses proches, une souffrance humaine et sociétale. Les problèmes de santé, le décès prématuré, l'agressivité, les problèmes d'argent, la négligence familiale, la solitude... sont autant de conséquences possibles des dépendances. La consommation de drogues, tant légales qu'illégales pose problème. Cependant, il existe une grande différence entre les risques sanitaires et les nuisances liés aux drogues douces telles que le cannabis et ceux liés aux drogues dures telles que la cocaïne, le crack, l'héroïne et l'alcool. Les problèmes liés à certaines drogues douces sont mieux pris en main lorsqu’on les sort de l'illégalité. C'est notamment le cas pour le cannabis. Ce raisonnement ne s'applique évidemment pas aux drogues dures.
Dans notre société individualisée où chacun doit être performant alors que les rythmes s'accélèrent et où les échecs sont toujours perçus comme personnels, les gens se tournent davantage vers des stupéfiants pour échapper à la réalité. Nous aspirons à une société solidaire et inclusive où il n'est pas nécessaire d'avoir recours à des drogues pour se détendre, pour réussir à travailler ou encore pour oublier ses problèmes pendant un moment.
Pour nous, ce n'est pas l'utilisateur individuel qui doit être le plus durement sanctionné. Le ministre Van Quickenborne (Open Vld) veut infliger des amendes allant jusqu'à 1 000 euros aux personnes prises en flagrant délit de consommation de cocaïne. Cette répression à l'encontre des utilisateurs ne va pas inciter les personnes dépendantes à chercher de l'aide.
Nous voulons donc nous attaquer à l'addiction, pas à la personne qui en souffre. Alcool, drogues illégales comme la cocaïne ou le crack, médicaments, jeux d'argent : la tentation des addictions est omniprésente. On ne parle pas ici d'un verre ou d'un joint pour se détendre. Il y a dépendance lorsqu'une consommation cause des problèmes dans la vie de celui qui s'y adonne et qu'il continue malgré tout de le faire. Il est alors véritablement dépendant et consomme de l'alcool, des drogues ou d'autres substances d'une manière problématique et nuisible à sa santé et à son entourage. La dépendance est une maladie.
Nous jugeons une politique de lutte contre la dépendance par la diminution ou l'augmentation de trois facteurs : le nombre de personnes dépendantes, les dégâts physiques et psychosociaux chez les toxicomanes ainsi que leur impact sur la société.
Vue sous cet angle, la politique actuelle est un véritable échec. Dans la plupart des cas, la consommation de drogues, d'alcool et de médicaments par le consommateur stagne, voire augmente. Officiellement, on reconnaît qu'il faut une approche intégrée, basée sur la prévention, l'aide, le contrôle et la répression. Mais, sur le terrain, la prévention est quasi-inexistante. De plus, les services d'aide manquent cruellement de moyens. En ce qui concerne les drogues illégales, le gouvernement Vivaldi se concentre principalement sur la répression, avec les carences que l'on sait. Et en ce qui concerne l'alcool et les jeux d'argent, elle a laissé le marché évoluer librement.
Sur l'ensemble des dépenses publiques consacrées à la lutte contre l'alcool, les drogues illicites et les médicaments psychoactifs, à peine 1,2 % est consacré à la prévention. La part dédiée à la répression est, elle, disproportionnée et ne cesse d'augmenter. Prenons plus précisément les dernières données disponibles sur les drogues illicites. Elles remontent à une étude de 2011 qui dit que 61 % des fonds sont consacrés à la répression, 35 % à l'aide médicale, 3 % à la prévention et 1 % à la réduction des risques.
Nous voulons donner la priorité à la prévention. En effet, nous pensons que mieux vaut prévenir que guérir. Ensuite, la priorité sera mise sur l'aide et sur la réduction des risques. Les causes de l'abus d'alcool et d'autres drogues et de la toxicomanie sont plurielles et très complexes. C'est précisément la raison pour laquelle une approche intégrée est nécessaire : c’est-à-dire un souci constant de la prévention, une intervention précoce, une large palette d'aides, une réduction des risques, de l’aide à l'intégration, etc.
Nous pensons également qu’il est nécessaire d’envisager la question d'un point de vue sociétal. En effet, les addictions se développent sur un terreau d'inégalités sociales, d'exclusion et d'isolement. Ou bien à cause du stress (professionnel) ou du déséquilibre travail-famille. Ou encore par perte de perspectives. L'addiction est souvent dans ces cas-là un moyen d'échapper à la réalité. Ainsi, la lutte contre les addictions se gagne aussi en construisant une société juste, émancipatrice, avec des perspectives pour les jeunes et des opportunités de développement social, culturel et sportif.
Un. Un plan d'action pour lutter contre les drogues et les addictions
- Nous posons un diagnostic global. Les plans d'action interfédéraux de lutte contre les drogues et les addictions (stupéfiants, alcool, drogues, tabac et jeux) sont redéfinis. Pour ce faire, nous faisons appel à des acteurs de terrain, des experts du vécu et des spécialistes.
- À partir de ce diagnostic, nous revoyons la loi sur les drogues de 1921, ainsi que les décrets régionaux en la matière. Nous corrigeons cette loi en tenant compte des défis et des connaissances actuels.
- Nous renforçons le suivi et l'évaluation des politiques de lutte contre les drogues et les addictions via la Cellule générale de politique en matière de drogues (CGPD), un organe interfédéral.
- En Belgique, l'alcool est omniprésent, habituel et quotidien. Nous lançons un plan d'action national ambitieux pour lutter contre l'abus d'alcool.
Nous fondons nos politiques de lutte contre les addictions sur les connaissances des scientifiques et des acteurs de terrain. Ce qui, malheureusement, se fait trop peu à l'heure actuelle. Les problèmes de drogue sont trop souvent considérés d'un point de vue purement moral ou alors pour marquer des points sur le plan politique. Nous voulons partir de la pratique. Nous mettrons tous les acteurs autour de la table pour, avec eux, établir un diagnostic global et élaborer un plan d'action interfédéral. Sur base de leur diagnostic, nous reverrons aussi la loi sur les stupéfiants de 1921. Nous prendrons également en considération les remarques de la Cellule générale en matière de drogues sur la proposition de modification de la loi sur les drogues ainsi que les recommandations de cette cellule.
Nous consacrerons des efforts particuliers pour lutter contre le problème de l'alcool. Sa consommation monte en flèche et la perception générale est que c'est tout à fait normal. La Belgique est le pays d'Europe occidentale où la consommation d'alcool est la plus élevée. Trop peu de mesures sont prises à cet égard, notamment en termes de prévention. Nous voulons nous confronter au lobby de l'alcool et aux intérêts financiers qui y sont liés.
Deux. Investir dans des programmes de prévention et de sensibilisation
- Nous soutenons une politique de prévention à grande échelle, ciblant les écoles mais aussi les mouvements de jeunesse, les animateurs de rue, les parents, le secteur de la santé, la police et le système judiciaire.
- Nous prenons des mesures fortes contre la publicité pour l'alcool et les jeux d'argent. Nous mettons en œuvre la décision relative à un emballage neutre identique pour tous les produits du tabac.
- En ce qui concerne l'abus d'alcool, nous mettons en place des mesures structurelles en matière d'éducation et de prévention. Nous réduisons le risque de consommation excessive d'alcool.
- Mieux vaut prévenir que guérir. De manière générale, nous misons davantage sur la prévention, qui doit constituer la première ligne en matière de lutte contre les addictions.
Nous voulons rompre avec les politiques actuelles et investir dans des politiques de prévention. De même pour des programmes de sensibilisation aux addictions efficaces. Cela nous permettra d'économiser des ressources par la suite.
Ces programmes s'adresseront à différents publics cibles, avec des sessions d'information dans les écoles, les maisons de jeunes et les mouvements de jeunesse. Ils auront recours à des témoignages personnels qui ont souvent un fort impact. Du travail sera aussi réalisé à destination des patrons de bars et d'établissements horeca, des services de la justice et de la police, des parents, des travailleurs de rue et du monde médical.
Il n'est pas normal qu'un spectateur soit bombardé de publicités pour l'alcool et les paris sportifs lorsqu'il regarde un match de football. Tout comme la publicité pour le tabac a été progressivement interdite, nous appelons à une interdiction progressive de la publicité pour l'alcool et pour les jeux d'argent, c’est-à-dire les paris en ligne, les jeux de hasard en ligne et les casinos. Nous commencerons par les spiritueux, mais aussi par les produits qui ciblent spécifiquement les jeunes : les alcopops, les premix comme le Bacardi Breezer, les premix stimulants comme la Vodka Red Bull ou encore les shots.
Trois. Un plan d'action contre la criminalité organisée liée au trafic de stupéfiants
- Nous réinvestissons dans les douanes, la police judiciaire fédérale et le parquet. Suite à des années d'austérité, ces services publics sont à sec. Nous faisons en sorte qu'ils puissent à nouveau faire leur travail convenablement.
- Nous fournissons des scanners mobiles supplémentaires au port d'Anvers.
- Il faut « suivre l'argent ». Nous abolissons complètement le secret bancaire et frappons le crime organisé au portefeuille.
- Nous voulons mettre davantage de pression sur des pays tels que les Émirats arabes unis afin que les criminels condamnés pour trafic de drogue soient effectivement extradés.
La lutte contre la grande criminalité est l'affaire de services spécialement formés à cet effet : la police judiciaire fédérale et le parquet poursuivent les criminels de la drogue. Les douanes cherchent la drogue. Ces services savent ce qu'ils ont à faire et font du bon travail. La police judiciaire fédérale a réussi à pirater les cryptophones (téléphones sécurisés) utilisés par les gangs de la drogue pour communiquer. Elle a ainsi surveillé leurs conversations pendant des mois. Dans cette affaire, appelée Sky ECC, plusieurs gros bonnets ont déjà été arrêtés et des drogues, de l'argent d'origine criminelle et des armes ont été saisis. Le parquet fait tout ce qui est en son pouvoir pour poursuivre les coupables. En 2022, les douanes ont réussi à saisir pas moins de 110 tonnes de cocaïne dans le port d'Anvers.
La coalition suédoise (2014-2018) de Charles Michel et Bart De Wever a opéré des coupes féroces dans le budget de ces services. Sous le ministre Jan Jambon (N-VA), celui de la police judiciaire fédérale s'est vu raboter de 200 millions . Entre 2014 et 2021, 400 membres du personnel ont été licenciés.
Le bourgmestre d'Anvers, Bart De Wever, prétend être le seul à prendre le problème de la drogue au sérieux. Il reproche à tous les autres niveaux politiques d'échouer. La vérité, c'est que son parti est en partie responsable des énormes économies infligées aux services de lutte contre la grande criminalité. La guerre contre la drogue que De Wever a pompeusement proclamée il y a dix ans a lamentablement échoué. La quantité de stupéfiants en circulation n'a pas diminué, le trafic et la consommation ont augmenté, les cartels de la drogue sont plus puissants que jamais, les rivalités entre gangs se sont aggravées... Le politique met exagérément l'accent sur les petits dealers de rue, mais les grands cartels sont toujours bien présents.
Si la Vivaldi a effectivement recommencé à investir, ses efforts sont nettement insuffisants : la police judiciaire fédérale a besoin de 1 000 employés supplémentaires selon sa direction et le parquet. Or, 400 personnes ont été recrutées au cours de cette législature. C'est moins de la moitié de ce qui est nécessaire. La police a bénéficié de 310 millions d'euros d'investissements mais, dans le même temps, elle subit une économie linéaire de 212 millions d'euros. Au total, elle n'aura donc reçu que 98 millions d'euros d'investissement net sur l'ensemble de la législature. L'augmentation salariale promise aux policiers fin 2022 a été reportée. Ce n'est pas comme ça que l'on rendra le métier d'agent de police plus attrayant.
Les douanes ne peuvent scanner que 1 % de l'ensemble des conteneurs dans le port d'Anvers. On nous promet un premier scanner à drogue mobile depuis 2020. On l'attend toujours. 700 agents des douanes sont actifs dans le port d'Anvers, dont la superficie est très vaste. Ils sont 2 000 au port de Rotterdam, qui est beaucoup plus concentré. Rien d'étonnant à ce que ce dernier soit mieux contrôlé.
Le ministère public travaille avec une norme de personnel qui date de 1953. En pareilles circonstances, il est non seulement contraint d’élaguer et de se concentrer sur les priorités, mais aussi de faire des choix au sein de celles-ci. Cela va si loin que le parquet d'Anvers en est réduit à choisir à quoi affecter ses effectifs : à la chasse au trafic d'êtres humains (scandale Borealis), à la pollution industrielle (scandale des PFOS) ou aux attaques liées au trafic de drogue.
Depuis des années, tous ces partis politiques n'ont que des slogans à la mode à la bouche : « dégraisser pour mieux grandir », « vivre selon ses moyens », « supprimer le superflu », « réduire les dépenses publiques ». Cette politique d'austérité a pourtant échoué.
Nous voulons plutôt « suivre l'argent ». À Chicago, dans les années 1930, ce ne sont pas la contrebande, l'alcool illégal ou encore la drogue qui ont mené le gangster Al Capone en prison. C'est sa feuille d'impôt. Nous devons être en mesure d’avoir accès à ces feuilles. 40 milliards de dollars. C'est le montant estimé de ce que rapportent chaque année les drogues qui entrent dans notre pays via le port d'Anvers. Cet argent devrait être traçable.
Pour pouvoir lutter contre la mafia de la drogue opérant à l'échelle internationale, les mouvements d'argent doivent être visibles et le secret bancaire complètement levé. Les partis clament tous à l'unisson qu'il faut « suivre l'argent » mais, au Parlement fédéral et européen, ils votent contre toute initiative visant à lever le secret bancaire. La Belgique reste encore à cet égard une exception en Europe, ce qui facilite la tâche des gangs de trafiquants de drogue.
« Nous devons être en mesure d'agir plus rapidement, sans devoir passer par la procédure lourde qui est actuellement en vigueur. En effet, actuellement, il faut d'abord demander des informations auprès du contribuable, puis attendre de constater que le contribuable ne coopère pas. Ce n'est qu'alors que l'on peut aller demander des informations à la banque. Nous devons être en mesure d'être plus réactifs ». C'est ce qu'affirme le haut responsable de l'inspection spéciale des impôts.
Nous devons frapper les criminels là où ça fait mal : au portefeuille. Si le secret bancaire est totalement levé, les banques seront tenues de divulguer aux autorités fiscales le solde et une synthèse annuelle des transactions de tous les comptes bancaires, comptes individuels, comptes de filiales à l'étranger, etc. Les banques seront aussi obligées de répondre aux demandes de renseignements des autorités fiscales.
Cela fait des années que les Émirats arabes unis, et Dubaï en particulier, sont un lieu de repli de prédilection pour les trafiquants de drogue belges et leur argent noir. Un traité d'extradition a été signé en novembre 2022, mais il n'en a encore donné lieu à aucune. Les barons de la drogue connus et condamnés continuent d'y mener une vie luxueuse et de poursuivre leurs affaires sans entrave. Nous voulons mettre davantage la pression sur le régime des Émirats arabes unis pour qu'il renvoie ces personnes en Belgique.
Quatre. Prendre soin des quartiers
- Investir dans la police de proximité, dans des équipes de quartier qui construisent des réseaux, qui connaissent les quartiers et sont en contact avec les habitants.
- Nous investissons dans la prévention à grande échelle. Nous misons sur un bon travail avec les jeunes, sur l'enseignement et sur des logements de qualité. Nous nous battons pour chaque jeune afin d'éviter qu'il ne soit séduit par l'appât du gain rapide.
Selon le criminologue Jelle Janssens, l'agent de quartier n'est pas la solution à la violence liée à la drogue à Anvers, mais il constitue une pierre angulaire du maintien de l'ordre. Les équipes de quartier ne vont pas empêcher les attentats à la grenade, mais elles constituent des oreilles et des yeux sur le terrain. Ces agents sont des visages familiers dans le quartier, qui connaissent les habitants et à qui ceux-ci peuvent s'adresser.
La norme d'encadrement minimale, à savoir un agent de quartier pour quatre mille habitants, est trop faible, en particulier dans un environnement urbain. Un agent pour deux mille habitants serait préférable.
Il est souvent fait référence à « l'approche de Rotterdam ». Là-bas, le bourgmestre se rend chaque semaine dans les quartiers et discute avec les gens. Il leur demande de quoi ils ont besoin, comment les autorités peuvent les aider, quelle est, selon eux, la chose la plus importante à faire. « Cette forme de la police de proximité garantit un soutien beaucoup plus important aux interventions de la police », souligne la criminologue Letizia Paoli, qui ajoute : « on obtient de bien meilleurs résultats avec une police de proximité, combinée à une police axée sur le renseignement, où les enquêteurs travaillent avec des informateurs et des informations qu'ils recueillent dans ces quartiers en étant proches des gens. Plusieurs exemples de l’étranger, notamment celui de Rotterdam, le prouvent. »
Il y a aussi la question de la prévention. Tous les acteurs s'accordent à dire que la lutte contre la drogue et la violence liée à la drogue nécessitent une approche globale en la matière. Des efforts à déployer pour renforcer le tissu social sont aussi nécessaires. Le nombre de jeunes qui grandissent dans une famille en situation de pauvreté est très élevé et ne va faire que s'accroître dans le contexte de crise de l'énergie que nous connaissons actuellement. En Flandre, un jeune sur huit quitte l'école secondaire sans diplôme. À Anvers, Gand et dans la région bruxelloise, c'est le cas d'un jeune sur cinq.
En raison de la non-indexation des moyens de fonctionnement dans le secteur de la jeunesse, à Anvers, 20 animateurs de jeunesse ont dû quitter le secteur en 2022. Les jeunes ont besoin de personnes de confiance et d'une fonction de relais sur les places et dans les quartiers. Les coupes budgétaires dans le secteur de la jeunesse doivent être annulées. Nous voulons davantage d'animateurs de jeunesse, pas moins.
Nous devons nous battre pour l'avenir de chaque jeune si nous voulons éviter qu'il ne soit recruté par la mafia de la drogue. Amsterdam va demander 2,3 milliards d'euros supplémentaires pour un enseignement sur mesure, pour améliorer la sécurité, pour multiplier les installations sportives, les maisons des jeunes, mais aussi pour désendetter les ménages en difficulté et améliorer l'accompagnement en matière d'emploi. Si nous voulons éviter aux jeunes de tomber dans le piège de l'argent rapide, nous devons leur donner des perspectives d'avenir.
Cinq. Consommation de drogues : plus d'aide, moins de risques
- Nous augmentons la capacité des centres d'accueil de jour et des centres d'hébergement pour les personnes présentant des problèmes de drogue ou d'alcool afin que tous ceux qui en ont besoin reçoivent les soins nécessaires et puissent suivre un parcours d'intégration.
- Nous donnons plus de moyens aux accompagnateurs psychosociaux mobiles afin qu'ils puissent commencer à travailler avec les personnes dans leur logement et leur situation de vie personnelle.
- Nous poursuivons sur la voie des « salles de consommation à moindre risque » afin que la consommation de drogue puisse se faire dans des conditions plus sûres.
Centres d'accueil, centres de jour, équipes mobiles et services d'urgence : tous sont nécessaires pour lutter efficacement contre les toxicomanies. Ils doivent garantir des soins de première ligne efficaces et l'accès à des soins de deuxième ligne spécialisés. Ils ont besoin de moyens financiers pour pouvoir fournir un encadrement adéquat. Ce n'est souvent pas le cas aujourd'hui. Il y a une grave pénurie de personnel dans le domaine de l'aide psychiatrique en deuxième ligne.
Une admission dans un établissement privé coûte environ 10 000 euros pour un traitement de 4 à 6 semaines. Une personne en difficulté financière ne peut pas débourser une telle somme. Les personnes à faibles revenus n'ont donc aucune chance d'être admises. Il existe des centres d'accueil subventionnés où l’on peut se rendre pour un coût raisonnable. Mais les listes d'attente pour ces établissements sont très longues et il n'y en a que très peu en Belgique.
Notre pays met très peu de choses en place pour réduire les risques liés à la drogue. Depuis des années, les spécialistes préconisent des « salles de consommation à moindre risque ». L'objectif de ces espaces n'est en aucun cas de promouvoir la consommation de drogues, mais de permettre qu'elle se déroule dans des conditions plus sûres. On peut ainsi éviter les overdoses, réduire les infections et diminuer le nombre de décès causés par la drogue. Les salles de consommation à moindre risque sont une alternative aux espaces publics pour les personnes dépendantes à la drogue. Des études scientifiques ont montré que cette approche fonctionne. Liège et Bruxelles possèdent toutes deux une salle de consommation. Les personnes dépendantes peuvent y consommer leur drogue tout en étant encadrées par des organisations qui ont des années d'expérience dans le travail avec les toxicomanes. Si elles veulent se sevrer d'une addiction à l'alcool ou au tabac, il existe toute une série de programmes et d'aides. De cette manière, les toxicomanes et leurs familles peuvent obtenir de l'aide pour remettre leur vie sur les rails.
En outre, nous voulons mettre en place des centres proposant du matériel stérile et des centres de dépistage de drogues afin de protéger les consommateurs et d'identifier rapidement les substances consommées. Cela nous donnera un aperçu rapide des tendances en matière de drogues.
Six. Réglementer le cannabis
- Nous légalisons et réglementons la production, la vente et la consommation de cannabis. En contrôlant la qualité et la quantité des produits vendus, nous luttons contre la dépendance. Le gouvernement prescrit les règles de production et de vente.
- Sur la base d'études scientifiques, nous autorisons l'utilisation du cannabis à des fins médicales, par exemple dans des traitements basés sur la chimiothérapie.
- La vente de cannabis aux jeunes de moins de 18 ans et dans les lieux où l'on vend également de l'alcool est interdite. Nous interdisons également la publicité pour le cannabis.
- Nous consacrons les recettes fiscales provenant du cannabis à des programmes de lutte contre la toxicomanie.
Malgré son interdiction, la consommation de cannabis ne diminue pas. 22,6 % de la population déclare avoir consommé du cannabis au moins une fois dans sa vie. Souvent, cette consommation est sporadique et « récréative ». Pourtant, il y a une augmentation significative du nombre de personnes traitées pour des problèmes de santé liés à la dépendance au cannabis.
Nous voulons mettre fin à l'hypocrisie et enfin lutter efficacement contre la dépendance au cannabis. Comme le cannabis est une drogue courante mais toujours interdite, les trafiquants maintiennent son prix à un niveau élevé et en tirent un maximum d'argent. La situation actuelle ne permet de contrôler ni la qualité ni la composition du produit. Les responsables politiques ont fait preuve d'hypocrisie avec leur politique de tolérance en demi-teinte. Mais cela n'apporte aucune solution.
La proposition de réglementer le cannabis a au moins l'avantage d’être claire. La grande majorité des acteurs de terrain et des experts scientifiques la soutiennent. L'Uruguay et le Canada ont déjà adopté cette politique. En Europe, le Luxembourg, Malte et l'Allemagne travaillent à l'élaboration d'une réglementation.
Il s'agit de réglementer strictement le commerce de cannabis et de faire en sorte qu'il reste bien entre les mains du gouvernement. Nous éviterons ainsi une commercialisation du cannabis, ce qui s'est produit dans certains États des États-Unis après la légalisation du cannabis. Dans un marché non réglementé, qu'il soit légal ou non, le profit est le moteur. Avec des conséquences désastreuses, comme on le constate avec l'alcool et le tabac. Cette expérience doit nous alerter et nous empêcher de faire deux fois la même erreur. Toute publicité ou promotion du cannabis sera interdite.
Nous impliquerons des organisations du terrain et des experts dans l'élaboration de la réglementation et, en particulier, pour établir les quantités autorisées. En tout état de cause, la production et la distribution doivent être réglementées par le gouvernement : soit à l'aide d'un modèle où des coopératives opèrent avec des licences, comme le Cannabis Social Club, en vigueur en Uruguay, soit via une société publique chargée de la production et de la distribution, comme la Société québécoise du Cannabis au Canada. Les consommateurs doivent être âgés d'au moins 18 ans. Ils doivent s'inscrire dans un point de distribution afin qu'un suivi soit possible. Des quantités maximales d'achat par mois sont fixées. Il est interdit de vendre du cannabis dans les lieux où l'on vend également de l'alcool.
Notre proposition rendra donc légales la production, la fourniture et la possession de cannabis, mais dans le cadre des critères définis. Nous couperons ainsi l'herbe sous le pied des dealers. Grâce à cette proposition, nous serons également en mesure de contrôler la composition du cannabis et les conditions d'hygiène dans lesquelles il est produit.
En renonçant à une politique d'interdiction, nous économiserons de l'argent. Cet argent, nous le consacrerons à la lutte contre les grands barons de la drogue, à la prévention et l'aide. L'argent que nous tirerons de la production de cannabis et de sa taxation sera réinvesti dans des programmes de lutte contre d'autres dépendances.
Sur la base d'études scientifiques, nous autoriserons l'utilisation du cannabis à des fins médicales, comme le font déjà de nombreux pays européens. La réglementation en la matière diffère de celle qui s'applique à la consommation à des fins récréatives. Nous appliquerons ici les réglementations relatives aux produits pharmaceutiques, à savoir la supervision et la prescription par un médecin traitant et la disponibilité du produit en pharmacie.